Conseil d’Etat: plateformes numériques et puissance publique

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Conseil d’Etat: plateformes numériques et puissance publique

Le Conseil d’Etat fait paraître, ce 28 Septembre, son rapport annuel sur « Puissance publique et plateformes numériques, accompagner l’ubérisation »

http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/174000714.pdf.

Le rapport souligne que les plateformes remettent en cause les droits nationaux et que ceux-ci apparaissent partiellement inadaptés : il cite ainsi les règles de fixation des prix, inopérantes quand les transactions ne coûtent quasiment rien et que, de surcroît, le prix des données n’y est pas inclus, ou les règles de la concurrence, la taille de certaines plateformes leur permettant d’assécher un marché. De même, le droit de la consommation doit s’adapter quand le service est effectué par un particulier. Quant à la pertinence de la distinction traditionnelle, encore ancrée dans notre droit social, entre salarié et travailleur indépendant, elle est à l’évidence remise en cause. Enfin, il existe certes des plateformes publiques, y compris pour effectuer des démarches en ligne, mais l’organisation reste « en silos » et les administrations demandent chacune des renseignements et des justificatifs parfois semblables. Le Conseil d’Etat appelle donc à repenser le droit en se fondant sur un certain nombre de principes : le nouveau droit doit favoriser le développement des opérateurs, et non pas s’y opposer, à condition de protéger également les usagers contre les excès. Le droit, qu’il soit appliqué au secteur traditionnel ou numérique, doit être unique et ne pas utiliser des dispositifs dérogatoires ou exceptionnels. Enfin, la règle doit être simple et il faut donc la repenser si nécessaire à l’occasion du développement des plateformes. S’ensuivent 21 propositions, allant de l’écriture, au niveau européen, d’une sorte de « Code des principes » (ainsi : « c’est l’utilisateur de l’algorithme qui est responsable de son utilisation ») à l’unicité de la protection sociale des travailleurs, en passant par l’encouragement à créer des formes de représentation des personnes qui utilisent des plateformes pour travailler. Il faut, dit le Conseil, étendre aux acteurs de l’économie traditionnelle le droit applicable aux plateformes (exemple : droit pour tous à livrer des médicaments à distance), réorganiser le service public en tenant compte de l’existence de plateformes et permettre aux administrations de collaborer pour échanger les données des usagers qui y figurent. Le rapport, nécessairement général puisqu’il appelle à une réflexion collective sur l’évolution du droit, est stimulant. Il soulève cependant une forme d’inquiétude diffuse : le travail d’harmonisation et de simplification du droit apparaît titanesque. Sera-t-il de plus si facile « d’encadrer les excès et les abus » tout en développant les plateformes ?