Evaluation du CICE: suite et, il faut l’espérer, fin

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Evaluation du CICE: suite et, il faut l’espérer, fin

France Stratégie, officiellement en charge, avec un groupe de suivi composé de parlementaires, de partenaires sociaux et d’experts, d’étudier les effets du CICE (crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi) depuis sa mise en place en 2013, a remis début octobre son 5e rapport. Cela paraissait une bonne idée que de suivre et d’évaluer une mesure tendant à limiter les charges sociales des entreprises et destinée à améliorer leur compétitivité et à créer des emplois. Eh bien, au final, pas vraiment. Les 3 premiers rapports n’ont pu qu’évaluer la mise en place du dispositif, ce qui était inintéressant. En 2016, le rapport a pu évaluer l’année 2014 seulement (le crédit d’impôt est un mécanisme différé qui s’applique en N +1). Il avait alors eu du mal à isoler les effets du CICE, correspondant à une baisse de charges, des effets de sens contraire qui ont eu lieu à la même époque (augmentation du forfait social et des cotisations vieillesse). De fait, les politiques seraient plus faciles à évaluer si elles étaient cohérentes. Sur le fond, le rapport 2016 concluait que le CICE n’avait pas eu d’effet sur l’investissement ni sur la R&D ni sur les exportations et que les effets sur l’emploi étaient très incertains, peut-être pas de créations du tout, mais plus probablement entre 45 000 et 115 000 créations. Le rapport de cette année dit que le CICE a amélioré les marges des entreprises (c’est un effet mécanique des allègements de charge, pas besoin d’experts pour le comprendre).  Sur l’investissement, la recherche et les exportations, son effet n’est pas visible mais peut-être parce que ce sont des décisions qui prennent du temps et que les marges doivent d’abord s’améliorer (en 2013 et 2014, les effets étaient pourtant annoncés comme rapides mais sans doute imprudemment). Sur l’emploi, eh bien, un effet positif est vraisemblable. Le groupe de suivi a demandé des études complémentaires. Cela paraît peu utile : pour un certain nombre de raisons (le contexte économique, l’absence de confiance, le fait que la mesure ait embrassé large et n’ait pas été sélective), le CICE n’a pas eu d’effets nets et rapides. Plus le temps passera, plus il sera difficile d’isoler les effets de la politique mise en place en 2014 d’un contexte plus récent et fondamentalement différent. Il ne faut sans doute pas vouloir évaluer des mesures à ambition de long terme en gardant le nez sur le guidon.