Les évolutions de l’emploi: polarisation et inégalités territoriales

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Les évolutions de l’emploi: polarisation et inégalités territoriales

Insee première (n° 1674, novembre 2017 www.insee.fr/fr/statistiques/3198483) étudie les évolutions de la structure des emplois de 1984 à 2014. En 30 ans, 7,4 millions d’emplois ont été créés et 3 ont été détruits (le solde est de 4,4). Ont été créés 2,7 emplois de cadres et de professions intellectuelles qualifiées supplémentaires, surtout dans la recherche, la gestion et les métiers informatiques mais aussi dans la santé. Dans l’emploi total, le pourcentage de ce type d’emplois est passé de 8,7 % à 17,5 %. La totalité des secteurs est impacté, que ce soit les ingénieurs d’étude, les cadres financiers ou administratifs et certaines professions libérales, le secteur public, le commerce interentreprises et même les secteurs de production. Ces cadres et professions supérieures représentent 25 % des emplois dans les villes centres des pôles urbains de plus de 100 000 habitants et jusqu’à 35 % à Paris ou 30 % à Toulouse ou à Grenoble. Ils sont nettement moins présents dans les autres grands pôles urbains et, a fortiori, les moyennes et les petites aires.  A l’autre extrême des qualifications, l’augmentation des emplois de commerce et de service de proximité a conduit, avec le développement des fonctions transports et logistique, à une augmentation des employés non qualifiés, à hauteur de 1,5 millions. Ces emplois représentaient en 1982 8,3 % des emplois et 12,9 % en 2014 : il s’agit d’aides à domicile, d’assistantes maternelles, d’employés de grande distribution, de serveurs de restaurant et d’agents de sécurité. Leur répartition géographique est plus égalitaire que celle des cadres : ils sont un peu moins présents dans les très grands pôles (11,7 %), un peu plus dans les couronnes des grandes aires (14,7%) mais leur proportion reste élevée dans les moyennes et petites aires (14,3 %). Ces évolutions s’accompagnent, du fait de la diminution des emplois de production, d’une baisse des emplois d’ouvriers non qualifiés de 1,2 million, surtout dans les grandes villes centres et leurs banlieues, ces emplois étant davantage présents dans les zones agricoles et vinicoles. Quant aux autres emplois qualifiés (artisans, commerçants, professions intermédiaires, employés et ouvriers qualifiés), les évolutions sont disparates (les professions dites intermédiaires augmentent, d’autres diminuent) mais cette catégorie, prise globalement, voit son importance baisser tout en restant dominante : elle est passée de 67,4 % de l’emploi en 1984 à 61,2 % 30 ans après.

Ces analyses chiffrées sont en réalité puissamment qualitatives : elles témoignent à la fois d’une polarisation de l’emploi, comme dans d’autres pays (où l’évolution est parfois encore plus nette, comme aux Etats-Unis), et d’une diminution qui semble inéluctable de fonctions de production. Elles témoignent des changements technologiques à l’œuvre, valorisation des compétences complexes au détriment des emplois de routine, comme d’une concurrence plus soutenue, avec le rôle plus fort de la recherche, de la performance de gestion et des services de haut niveau. Elles poussent à améliorer la qualification de la population, sachant aussi qu’il sera difficile d’accepter que les écarts sociaux se creusent trop, que les services à la personne continuent à être mal rémunérés et que le développement de certaines fonctions d’exécution, logistique et commerce, se traduise par une dégradation de la qualité des emplois offerts, CDD et temps partiels.  Tout cela sans même évoquer l’inégale répartition géographique des professions moteurs de l’économie, qui rend pessimiste sur l’espoir de rééquilibrer les inégalités territoriales.

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