Contrôle des établissements d’urgence: entre hypocrisie et naïveté, ne choisissez pas

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Contrôle des établissements d’urgence: entre hypocrisie et naïveté, ne choisissez pas

Il faut lire la circulaire du ministre de l’Intérieur du 12 décembre 2017 sur « L’examen des situations administratives dans l’hébergement d’urgence ». Le modèle d’argumentaire est celui que certains scientifiques appellent « en pot cassé », image qui permet tout de suite d’en percevoir l’incohérence : « Je n’ai pas cassé ce vase » déclare l’enfant, « parce que je ne l’ai jamais vu et puis, de toute façon, quand je l’ai pris, il m’a glissé des doigts ».  Reprenons le raisonnement du ministre de l’Intérieur, aidé de son collègue du Ministère de la cohésion des territoires puisqu’il est question de logement, ou, du moins, d’hébergement. Le Code de l’Action sociale et des familles affirme un principe d’accueil inconditionnel, à tout moment, dans un centre d’hébergement, sans vérification de la régularité de séjour. Tout le monde est pleinement d’accord pour respecter cette règle, dit la circulaire. Cependant, quand il s’agit d’étrangers, il faut aider ces personnes, qui n’ont pas toujours la garantie d’un examen rapide de leur situation administrative. Nous autres autorités publiques y avons autant intérêt qu’elles puisqu’elles saturent des lieux qui ne sont pas faits pour elles : nous pouvons trouver d’autres solutions. Nous allons donc nous y employer. Pour cela nous allons mettre en place un dispositif de « suivi administratif robuste » des étrangers en établissements d’urgence. Pour aider.

Cela dit, comme c’est logique qu’un étranger en situation irrégulière soit « éloigné », si nous en rencontrons un, il le sera.

De toute façon, si l’accueil dans ces centres est inconditionnel, il n’en est pas de même pour le maintien. Le maintien est soumis à une évaluation. Ce serait du moins logique de le faire, pour orienter les gens. Comme ce n’est pas fait, les fonctionnaires du ministère de l’Intérieur vont s’en charger. Ils vont donc venir dans les centres, ils vont faire le point sur tous les étrangers et éventuellement les convoquer à la préfecture si la situation n’est pas claire. Pour les autres, on va enregistrer les demandes d’asile (il existe donc des gens qui veulent demander l’asile et qui ne savent pas où s’adresser ? Il est vrai que le simple dépôt d’une demande prend des semaines sinon des mois…) et loger les demandeurs (mais il n’y a plus de place, c’est précisément pour cela que les demandeurs sont dans le circuit ordinaire…). En fait, tout cela intéresse assez peu les équipes de l’Intérieur, ce qui les intéresse, ce sont les étrangers en situation irrégulière.

Si les responsables d’établissement d’urgence laissent entrer ces « équipes mobiles » (et comment refuser ?), les étrangers n’y viendront plus. Cela va libérer des places mais pas vraiment résoudre le problème. C’est d’ailleurs pour empêcher de telles dérives que l’accueil inconditionnel a été décidé. Oui, l’accueil, mais pas le maintien…Ah, c’est compliqué.