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France: la compétitivité perdue

L’organisme d’études proche des milieux patronaux Coe-Rexecode publie en janvier son étude annuelle sur la compétitivité de la France. Malgré une amélioration de la compétitivité coût dans la période récente, due à la mise en œuvre du Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi et du Pacte de solidarité, malgré une baisse en 2017 du coût salarial unitaire dans le secteur manufacturier (ce coût tient compte de la productivité) alors qu’il est stable dans les autres pays d’Europe, malgré une stabilisation en 2017 des prix manufacturiers à l’exportation, cette compétitivité se dégrade : la part des exportations françaises des biens et services dans celles de la zone euro, qui représentait 13,2 % en 2016, a légèrement reculé en 2017 à 12,9 %, cette évolution s’inscrivant dans une tendance de long terme (la part de la France atteignait 17 % en 2000). Le déficit des transactions courantes devrait se creuser un peu plus en 2017, dépassant 1 % du PIB. L’étude note surtout que la « base industrielle » s’est rétractée : les entreprises les moins performantes ont disparu et les autres ne parviennent pas à « monter en gamme ». L’enquête auprès des importateurs montre que la qualité des biens d’équipement et produits intermédiaires français est jugée moyenne, voire médiocre pour leur prix, et que ceux-ci sont jugés peu innovants. La conclusion est morose : la réindustrialisation prendra du temps, la transformation du CICE en allègements de cotisations va enlever aux entreprises une part des gains précédents (le CICE était déduit de l’IS) et la réduction des coûts doit impérativement s’accompagner de mesures structurelles sur l’innovation et la formation.

Il est certain que, dans la baisse de la compétitivité, la compétitivité prix joue, mais elle est loin d’être seule en cause et, en tout état de cause, sauf à mettre en péril un modèle social déjà fragile, il est difficile d’aller plus loin dans les réductions de coût salarial. Au demeurant, l’étude pourrait mentionner les perspectives d’allègement de l’impôt sur les sociétés. La situation n’en est pas moins grave : comme le souligne un intervenant de Coe-Rexecode dans une conférence visible sur le site, l’économie française redémarre en ce début 2018, portée par un environnement mondial favorable, sans pour l’instant, de manière surprenante, de risque inflationniste. Le climat est bon, les créations d’emploi dans le secteur marchand sont fortes (même sans baisse du chômage), l’investissement progresse, la proportion d’embauche en CDI augmente. Cependant, la croissance mondiale est assise sur de forts déséquilibres, avec un risque inflationniste réel. L’économie française souffre quant à elle de difficultés structurelles : difficultés de recrutement des personnels très qualifiés, creusement de l’écart entre les besoins d’emplois qualifiés et l’incapacité des entreprises à embaucher des personnes peu qualifiées (difficulté que la formation ne peut résoudre immédiatement), faible taux d’emploi, qualification de la main d’œuvre, même qualifiée, globalement plus faible qu’en Allemagne et au final faible compétitivité. Le tableau est sombre voire terrible, s’inscrivant de plus dans un certain pessimisme sur la capacité de la reprise à s’installer de manière durable au niveau international. Nous serions donc en rémission ?