Débat public sur la PPE : flou total ou directivité extrême ?

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Débat public sur la PPE : flou total ou directivité extrême ?

La commission nationale du débat public a engagé un débat national sur la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) que le gouvernement doit arrêter fin 2018. La loi de transition énergétique de 2015 a en effet prévu l’élaboration de cet outil de pilotage pour fixer, dans les années à venir, la répartition du mix énergétique français, avec, en particulier, s’agissant de la production d’électricité, un débat à trancher entre la production nucléaire et celle des énergies renouvelables. Selon la loi, la PPE couvre des périodes successives, d’abord 2016-2018 puis 2019-2023 et 2024-2028, sachant que des objectifs ont été fixés originellement pour guider son élaboration : en 2050, baisse de moitié de la consommation d’énergie ; en 2030 baisse de 40 % de la consommation d’énergie fossiles (par rapport à celle de 1990) et part des ENR (énergies renouvelables) atteignant 32 % ; dès 2025 baisse de la part de l’énergie nucléaire, qui ne fournirait que 50 % de la consommation d’électricité, contre 75 % aujourd’hui.  La consultation publique de 2018 porte sur les PPE de 2019-2023 et 2024-2028, sachant d’une part que la PPE de 2016-2018 n’a pas abordé la question du nucléaire, du fait de l’incapacité des pouvoirs publics à en décider, d’autre part, que le ministre actuel de la transition énergétique a d’ores et déjà annoncé, sans doute avec bon sens, qu’il ne serait pas possible de respecter l’échéance de 2025 pour la baisse de l’énergie nucléaire. La consultation s’ouvre donc sur un paysage très flou, le dossier fourni par le maître d’ouvrage étant vide de toute décision ou projet de décision et les objectifs fixés par la loi étant, du fait des différentes annonces, abandonnés ou fragilisés. De plus, si la Commission met à disposition du public un dossier fourni par le maître d’ouvrage (à savoir le ministère) qui ne comporte que des objectifs généraux (« Maintenir un haut niveau de sécurité des approvisionnements » ou « Aller vers un système flexible et décarboné »), elle n’a organisé que des « Ateliers d’information et de controverse » non ouverts au public mais filmés et laisse aux initiatives locales le soin de prévoir des réunions publiques. A quoi rime donc une consultation publique sans projet, sans objectifs, sans indication d’échéancier et sans vraies réunions avec le maître d’ouvrage ? Eh bien, en fait, à connaître ce que sera sans doute l’annonce du ministre à l’été ou à l’automne prochain. Au détour d’un paragraphe, le dossier mentionne en effet les 5 scénarios de transition énergétique élaborés, en novembre 2017, par RTE (Réseau de transport d’électricité), une filiale d’EDF. Ces 5 scénarios reposent sur des « combinaisons » différentes d’énergie jugées possibles à échéance 2035. Le document de la consultation publique indique que seuls 2 de ces scénarios, ceux qui ne conduisent pas à construire de nouvelle centrale thermique à combustibles fossiles ou à augmenter les émissions de gaz à effet de serre de la production électrique française, sont retenus. Lorsque l’on se reporte aux dits scénarios (« Volt » et « Ampère »), l’on note que la réduction du nombre de centrales nucléaires à horizon 2035 y est respectivement de 9 et de 16 centrales, avec une part du nucléaire dans la fourniture d’électricité de 56 et de 46 %. A quoi rime une consultation où les choix sont connus d’avance sans être clairement énoncés ? Nous ne sommes pas prêts de nous passer du nucléaire…