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Carte scolaire: l’entretien des inégalités

Le site Métropolitiques publie le 18 avril 2018 une analyse de la carte scolaire http://www.metropolitiques.eu/Carte-scolaireau-dela-de-la-mixite-comment-l-Etat-entretient-les-inegalites.html, pas très nouvelle à vrai dire mais bien structurée. La carte scolaire est née dans les années 60, sans débat politique à l’époque, d’une volonté de planification des moyens et d’aménagement des territoires. Dans les années 80, au nom de la liberté des familles, des dérogations se sont répandues. Les évaluations du dispositif ont toujours montré que les familles des classes supérieures et moyennes utilisaient davantage ces contournements, les catégories populaires, qui s’accommodent de la carte scolaire, y ayant beaucoup moins recours. A la fin des années 90, la mixité sociale des établissements scolaires est devenue un objectif des pouvoirs publics, compte tenu du constat de fortes ségrégations sociales sur le territoire. Sur le fondement d’une analyse soulignant les effets pervers de la carte scolaire, les pouvoirs publics ont prôné son assouplissement voire son effacement (c’est le choix de 2007, qui, sans surprises, a en fait accru les inégalités, certaines familles jouant mieux que d’autres le jeu des dérogations) mais le dispositif a atteint rapidement ses limites. En 2012, avec l’alternance politique, rien n’a changé, malgré le diagnostic d’un « échec de l’assouplissement », sauf la décision de mettre en place quelques expérimentations pour améliorer la mixité à l’école : ainsi, en 2016-2017, quelques collèges multi-secteurs ont été mis en place, sans suite ni sans véritable conviction.

Les travaux existant sur les inégalités sociales de réussite scolaire montrent que c’est moins l’absence de mixité sociale à l’école qui compte que les milieux sociaux d’appartenance. De plus, compte tenu de la difficulté des dérogations, les familles choisissent, pour accéder aux « bons établissements », des stratégies résidentielles plus simples ou l’inscription dans le privé.  Paradoxalement, les débats continuent pourtant de se focaliser sur la mixité scolaire alors même que le système fonctionne pour permettre à ceux qui veulent y échapper de le faire. En prônant la réintégration des établissements privés dans la carte scolaire et la « mise à niveau » des établissements scolaires publics, l’auteur de l’étude souligne qu’il s’agit là de la seule manière de rétablir une certaine logique dans la politique publique d’affectation des élèves dans les établissements. Certes : politiquement cependant, ces options ne sont pas complètement offertes et l’on voit mal que quelque pouvoir que ce soit impose cette contrainte à des établissements privés plutôt plébiscités dans l’opinion justement parce qu’ils pratiquent une sévère discrimination sociale. Reste, c’est vrai, à cesser de se focaliser sur la carte pour, plus simplement, améliorer la qualité de l’offre scolaire publique là où elle reste insuffisante. Mais cette entreprise serait très coûteuse et bouleverserait un statu quo bien établi. L’on va donc plutôt continuer à encourager la mixité sociale à l’école – ou à faire semblant.