Plan de lutte contre les pesticides : mieux vaut tard que jamais

Service national: un projet à évaluer sérieusement
6 mai 2018
Projet de loi constitutionnel : quelques surprises
13 mai 2018

Plan de lutte contre les pesticides : mieux vaut tard que jamais

La France a accepté l’autorisation accordée au glyphosate par les autorités européennes (elle pouvait refuser de l’appliquer, elle n’a pas voulu) et montré une étonnante souplesse dans le dossier des perturbateurs endocriniens : elle a accepté en juillet dernier une proposition de  l’Agence européenne de sécurité des aliments insuffisante pour encadrer un risque jugé comme « une menace mondiale » par la société savante compétente, l’Endocrine society, norme qui désormais obère lourdement l’avenir. L’on pouvait donc penser qu’elle avait définitivement choisi, dans le domaine des risques sanitaires, de plier devant une agence européenne ouvertement accusée par des scientifiques de renom et par la presse de collusion avec des lobbys. Or, sur les pesticides, la France apparaît aujourd’hui décidée à agir. L’échec des plans Ecophyto 1 et 2, qui comptaient sur la bonne volonté des acteurs et n’ont pas empêché une utilisation massive et croissante des pesticides, rendaient l’action nécessaire. Les risques pour la santé publique sont avérés, comme le démontre l’Inserm (« Pesticides, effets sur la santé : une expertise collective de l’Inserm », 2013), quoi qu’en disent les rapports patelins de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail qui déclarent (mais à vrai dire comme à peu près sur tous les sujets), qu’il faut prendre des précautions mais que les données manquent pour juger et que la priorité est d’approfondir les enquêtes. Appliquant les préconisations d’un rapport de 2017 (« Utilisation des produits phytopharmaceutiques », IGAS, Conseil   général de l’environnement et du développement durable, Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux), les pouvoirs publics annoncent en avril 2018 vouloir faire pression sur l’Union pour que les méthodes d’évaluation soient revues (ce serait un grand pas en avant si l’Agence européenne cessait de se fonder sur les rapports que lui fournissent les industriels) et que des substances reconnues comme dangereuses soient interdites, sans attendre l’échéance d’un éventuel renouvellement des autorisations. Les épandages à proximité de populations vulnérables (écoles, établissements de santé…) vont être encadrés, la recherche sur les alternatives sera davantage mobilisée, le plan Ecophyto sera renforcé par des contrats d’engagement entre parties prenantes, la redevance pour pollution diffuse sera revue (le partage entre usagers et agriculteurs de cette redevance, destinée à réparer les dommages causés à l’eau par la pollution agricole, fait l’objet de critiques récurrentes des associations écologiques) et les activités de conseil et de vente de produits obligatoirement devront être séparées. Le caractère tardif du plan est regrettable et son application effective devra être évaluée, tant les débats sur les pesticides sont, malgré les données de la science, peu consensuels. Du moins, une politique est-elle définie.