Union : ajustements budgétaires plus que révolution

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Union : ajustements budgétaires plus que révolution

Il nous est difficile parfois de comprendre le budget de l’Union, habitués que nous sommes à citer des chiffres annuels, là où l’Union raisonne en termes pluriannuels. Oublions donc que le budget de l’Union en 2018 ne représente que 160 Mds et passons à des périodes de 7 ans : compte tenu de l’inflation et du départ du Royaume-Uni, les budgets 2014-2020 (963,5 Mds) et 2021-2027 (1279 Mds) sont donc identiques ou à peu près, avec une très légère baisse cependant si on rapporte ce budget au Produit national brut de l’Europe et si l’on reconstitue la base 2014-2020 sans le Royaume-Uni. La critique traditionnelle adressée de longue date au budget de l’Union a été qu’il privilégiait les actions tendant à maintenir certaines activités (l’exemple typique étant la PAC) et les fonds destinés à combler le retard de développement de certaines régions au détriment de l’avenir : le projet tente de corriger cette tendance, assez modestement. Il augmente les dépenses d’innovation et de recherche, celles en faveur de la jeunesse, du climat, de la politique de défense et de protection des frontières. Ces dépenses supplémentaires sont estimées à 114 Mds. Elles sont financées à 80 % par de nouvelles recettes (dont une prélevée sur l’assiette commune consolidée de l’IS) et à 20 % par des économies, réalisées sur la PAC et sur les dépenses de cohésion,  qui baissent respectivement de 5 % et 6 %. Les économies prévues s’inscrivent dans la prolongation des budgets précédents, la PAC et les aides structurelles ayant baissé depuis logtemps, même si la France s’en émeut à nouveau vivement, tant elle craint les réactions des agriculteurs et l’accusation de ne pas avoir su les « défendre ».  En outre, le budget crée de nouveaux mécanismes de solidarité entre Etats : un nouveau programme d’appui aux réformes (25 Mds) et un autre de stabilisation en cas de chocs sous forme de prêts (30 Mds).

La proposition la plus audacieuse est sans doute ailleurs : la Commission veut pouvoir utiliser l’arme budgétaire dans son « dialogue », aujourd’hui déséquilibré, avec des pays qui ne respectent pas l’état de droit, notamment la Pologne, la Hongrie ou Malte. Elle considère que le traité lui en donne le droit qui prévoit que l’efficacité des financements accordés par l’Union doit être garantie. Elle propose donc un nouveau mécanisme qui permettrait à l’Union de suspendre, réduire ou restreindre l’accès aux fonds de l’UE en fonction de la nature et de la gravité de l’altération de l’état de droit d’un pays bénéficiaire. Une telle décision pourrait alors être proposée par la Commission et adoptée par le Conseil par un vote à la « majorité qualifiée inversée » (elle ne pourrait être contestée qui une majorité s’exprime contre). Les pays de l’est de l’Europe vont bien évidemment contester cette procédure, qui, à vrai dire, relève d’un jésuitisme total. Mais parfois jésuitisme et morale s’accordent bien.