Commerce international, le CAE joue les Cassandre

Cour des comptes : sombre avenir pour les finances publiques
8 juillet 2018
Conclusion des assises de l’Outre-mer
17 juillet 2018

Commerce international, le CAE joue les Cassandre

S’il est un point sur lequel les diverses écoles d’économistes s’accordent, c’est sur les bienfaits du commerce international (meilleure allocation des ressources, économies d’échelle, baisse des prix, variété des produits offerts), même si elles reconnaissent aussi que le développement de la concurrence mondiale fait des perdants et si la mondialisation financière qui l’accompagne (mobilité du capital et de la base taxable) amoindrit les moyens des Etats et rend plus difficile la redistribution qui pourrait atténuer les conséquences négatives de la concurrence.

Ce point posé, la note du Conseil d’analyse économique de juillet 2018 (Avis de tempête sur le commerce international, quelle stratégie pour l’Europe ?) fustige l’analyse actuelle des Etats-Unis qui se focalise sur les soldes des échanges bilatéraux (notamment avec la Chine et l’Allemagne) et veut instituer des droits de douane avec tel ou tel partenaire commercial. Les soldes bilatéraux ne sont que le reflet des structures de production des différents pays et l’augmentation des droits de douane n’a pas d’effet sur eux. Seuls comptent les déséquilibres agrégés et, là aussi, ce qui est important pour les améliorer, ce ne sont pas les droits de douane mais l’action sur les déterminants macroéconomiques (prix des facteurs de production, productivité, inflation…).

Que va-t-il se passer si l’administration américaine persiste ?

D’ores et déjà, les décisions actuelles sont source d’incertitudes et ont donc des effets néfastes sur l’activité. Si une guerre commerciale « totale » devait finalement se déclencher (la note caractérise cette situation par une augmentation de 60 points des droits de douane sur les produits manufacturiers, qui sont aujourd’hui de l’ordre de 3 % entre l’Europe et les Etats-Unis), le PIB de l’Union diminuerait de 4 %, celui de la France de 3 % et l’effet serait similaire à celui de la crise de 2008, sans compter les impacts de plus long terme liés notamment au retour d’une « économie administrée ». La note ne se contente pas de prédire la catastrophe. Elle donne des conseils de stratégie : mettre en place des mesures de rétorsion mais faire des ouvertures sur l’engagement de négociations internationales sur le fonctionnement de l’OMC et sur les conditions de commerce avec la Chine (conditions de réciprocité, subventions étatiques, respect du droit de propriété) pour tenter de sauver le multilatéralisme. En cas d’échec (ce qui est probable), la note suggère que l’Union engage une stratégie de développement des accords commerciaux et qu’elle y inscrive des dispositions non commerciales sur l’environnement ou la politique fiscale (pour des raisons économiques de concurrence mais aussi pour développer d’autres modes de coopération). De fait, l’Union va devoir s’adapter à un environnement mondial nouveau : le précédent de 2008 montre toutefois qu’elle a du mal à se montrer réactive, ne serait-ce que parce qu’elle n’est pas unie. Souhaitons qu’elle y parvienne vite…