Une ségrégation scolaire amplifiée par le recours à l’enseignement privé

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Une ségrégation scolaire amplifiée par le recours à l’enseignement privé

Insee Analyses (n° 40, septembre 2018) étudie l’effet sur la ségrégation sociale des collèges du recours aux établissements privés d’enseignement. L’on sait, d’une manière générale, que la ségrégation sociale au collège, reflet de la ségrégation sociale dans le logement, est forte, comme l’a montré le rapport du Comité d’évaluation des politiques publiques de l’Assemblée nationale (Yves Durand et Rudy Salles, Pour une mixité sociale au service de la réussite de tous les élèves, CECPP, décembre 2015). Selon les chiffres de la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance du ministère, les 337 collèges publics regroupant les 5 % d’établissements en bas du classement comprennent 70 % d’élèves défavorisés, soit le double de la moyenne nationale, et moins de 4 % d’élèves très favorisés. À l’inverse, 353 autres établissements, qui regroupent les 5 % de collèges les plus favorisés, comptent une proportion moyenne d’élèves appartenant aux catégories sociales très favorisées de 65,3 %, soit le triple de la moyenne nationale, celle des élèves appartenant aux catégories sociales défavorisées étant inférieure à 7 %.

L’Insee a voulu savoir quel rôle jouait dans cette ségrégation le recours aux établissements privés et l’a mesuré dans 3 villes, Paris, Clermont-Ferrand et Bordeaux, à l’entrée en 6e. Au niveau national, 22 % des élèves relèvent du privé à ce niveau et Bordeaux comme Clermont sont dans la moyenne (23 % et 21 % respectivement), moins Paris (30 %). Les conclusions de l’étude sont nettes :  la ségrégation serait nettement inférieure (entre un tiers et moitié moindre) si les élèves relevaient tous de leur collège de secteur. Le recours au privé amplifie donc la ségrégation scolaire dans des proportions importantes. Quant aux dérogations à la carte scolaire (inscription d’un enfant dans un autre collège public que celui de son secteur), elles modifient très peu la ségrégation. Dernière conclusion : les établissements privés refusent souvent d’être présentés comme regroupant des élèves de classes sociales favorisées et affirment pratiquer la mixité. Cependant, l’Insee affirme que leur contribution à la mixité sociale est nulle, non pas que leurs élèves soient tous favorisés mais parce que les établissements privés sont, comme ceux du public, spécialisés, soit plutôt dans l’accueil d’enfants favorisés, soit plutôt dans celui d’enfants plus modestes. Cette étude entre en résonnance avec les expériences menées depuis un an et tendant à une meilleure mixité sociale dans certains collèges de Paris, dans les 18e et 19e arrondissements, où les affectations ont été régulées, mais en dehors de toute participation des établissements privés. Les premiers résultats de l’expérimentation sont jugés encourageants…mais seraient meilleurs si le privé y était inclus, volontairement ou par incitation financière.