Cour des comptes: un référé dont personne n’avait besoin

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Cour des comptes: un référé dont personne n’avait besoin

La Cour des comptes a envoyé au Premier ministre, le 21 décembre 2018, un référé qu’elle juge bon de publier le 13 mars 2019. Elle y critique deux dispositions du régime actuel d’assurance chômage, le dispositif relatif à l’activité réduite, qui permet à un demandeur d’emploi de cumuler, dans certaines limites, son indemnisation et le revenu tiré d’une activité, et celui des droits rechargeables, qui permet à un demandeur proche de l’épuisement de ses droits et qui reprend un emploi temporaire de les recharger.

La Cour avait déjà critiqué en 2015 le régime de l’activité réduite qui incite les demandeurs d’emploi à travailler, améliore leur revenu e maintient leur employabilité mais qui est coûteux pour l’assurance chômage et risque de les installer dans une précarité durable s’ils acceptent continûment une suite d’emplois ponctuels. En l’occurrence, la Cour, qui rappelle qu’en théorie le cumul des revenus tirés de la nouvelle activité et de l’indemnisation ne peut dépasser le salaire de référence (celui touché avant le chômage), juge bon de dénoncer des cas jugés regrettables sinon répréhensibles : lorsqu’une personne qui cumule plusieurs emplois en perd un, elle cumule l’indemnisation de cette perte et ses autres revenus d’activité sans qu’il y ait application de la règle sur le plafond de cumul. En fait, cela touche les assistantes maternelles qui perdent la garde d’un enfant. De cet exemple très spécifique, la Cour tire la conclusion de possibles abus. Quant aux dispositions sur les droits rechargeables, les règles afférentes au « chômage involontaire » ne seraient pas les mêmes selon le moment du processus, période de « reprise de droits » précédemment acquis ou période de « rechargement ». La Cour reconnaît elle-même que différentes enquêtes auprès des demandeurs d’emploi montrent que ceux-ci ne maîtrisent absolument pas la complexité des règles du régime et sont donc dans l’incapacité d’en jouer. Elle n’en évoque pas moins, là aussi, de possibles stratégies d’optimisation.  De plus, la référence à une base journalière pour calculer l’indemnisation lui paraît complexe et elle souhaiterait que soit étudié le passage à une base mensuelle.

Plus sérieusement, la Cour dénonce le faible accompagnement par Pôle emploi des demandeurs en activité réduite, malgré le besoin exprimé par les allocataires et le principe de deux expérimentations sur ce sujet imposées par la convention tripartite de 2015-2018, dont l’une n’a pas été concluante et dont l’autre n’a pas été engagée.

Rappelons que le Premier ministre a demandé aux partenaires sociaux, en septembre 2018, de revoir, entre autres, le régime de l’activité réduite et du cumul, dans ce cas, des revenus d’activité avec l’allocation chômage ; que les partenaires sociaux ont échoué à répondre à cette demande, comme à définir un système limitant le recours aux CDD ; que le ministère du travail a repris la main sur ces dossiers. Que vient faire la Cour des comptes là-dedans ? Elle est chargée d’évaluer les politiques publiques, pas de doublonner les réflexions ni de surligner des risques d’abus microscopiques sur des dispositifs en cours de réexamen.