Réforme des retraites: les malentendus commencent

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Réforme des retraites: les malentendus commencent

Les débats sur la réforme des retraites ont été, jusqu’ici, paisibles. Il était vraisemblable qu’ils ne le resteraient pas longtemps. Il existe manifestement, au gouvernement, des dissensions sur le report ou pas de l’âge plancher auquel la loi permettra de partir, sachant que, si l’on écoute bien le Haut -commissaire, il est favorable au maintien de l’âge plancher à 62 ans tout en espérant, sans fard, que l’âge plancher ne sera pas l’âge réel et que, dans la pratique, les personnes partiront plus tard. Il ne lui a pas échappé que les prévisions actuelles du COR sur l’équilibre financier du système sont fondées sur un recul « spontané » de l’âge moyen à 63 ans en 2030 et à 64 ans en 2040, l’équilibre n’étant au demeurant assuré à cette échéance qu’avec une augmentation importante de la productivité. Il est donc clair que si l’âge de départ moyen est à 62 ans, le système ne peut s’équilibrer et que le dispositif devra prévoir des incitations nettes à partir plus tard. Cela dit, l’on comprend l’irritation des négociateurs puisque la fixation à 62 ans de l’âge plancher a été actée par l’Etat dans la première phase de la négociation.  Au-delà de ce débat, un autre risque de se profiler. Le Haut-commissaire a diffusé aux partenaires sociaux, fin février, une note sur les régimes spéciaux qui traitait de certaines de leurs spécificités, notamment le droit de certains corps ou catégories de partir en retraite largement avant 60 ans. La note se montrait ouverte à l’idée de préserver des dispositifs dérogatoires dans les régimes spéciaux à condition qu’ils répondent à des difficultés objectivement constatables et justifiées. La question est inflammable : les régimes spéciaux sont considérés par la population comme un privilège. La grande justification d’une réforme systémique qui applique à tout le monde les mêmes règles, c’est l’équité. L’on peut comprendre que des dérogations sur l’âge soient accordées aux carrières longues ou sur critères de pénibilité. Mais alors, ces critères doivent être identiques pour tous et non pas réservés à certains corps de la fonction publique ou aux ressortissants d’entreprises publiques. En quoi le travail d’un policier, qui part en moyenne à 56 ans, est-il plus pénible que celui d’un maçon, qui part à 62 ans ? De plus, c’est ouvrir la boîte de Pandore : à la SNCF, à la RATP, les personnels roulants partent encore plus tôt, entre 53 et 55 ans. Qui va payer ? Si la charge est mutualisée, où est la justice ? Mais si c’est l’employeur public qui finance, le pays aura le sentiment de payer sur ses impôts. Le projet de réforme des retraites doit trouver des compromis, allonger le plus possible les périodes de transition, chercher des compensations. Mais, s’il franchit certaines lignes, il risque de devenir incohérent.