Lier réforme systémique des retraites et rétablissement de l’équilibre financier?

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Lier réforme systémique des retraites et rétablissement de l’équilibre financier?

En septembre dernier, le Premier ministre a saisi le Conseil d’orientation des retraites (COR) pour établir un diagnostic de la situation financière du système à horizon 2025. Cette saisine est liée à sa conviction que la réforme doit prendre en compte les questions d’équilibre financier à court terme et qu’elle ne peut être mise en place que si le système est à l’équilibre, en particulier pour ne pas laisser croire aux jeunes qu’il reste une ardoise à effacer.

Surprise ! Enfin, pas vraiment…Le diagnostic du COR remis en novembre est à peu près exactement identique à celui qu’il avait établi, en juin dernier, dans son rapport annuel. De fait, on voit mal comment les tendances lourdes qui influent sur le système seraient remises en cause en quelques mois. Certes, le COR fait des ajustements : il évalue désormais le déficit en 2025 entre 7,9 et 17 Mds (fourchette liée aux hypothèses de croissance et de productivité) pour tenir compte de facteurs négatifs pour le solde (la sous-indexation d’une part seulement des pensions, une évolution peu dynamique des rémunérations dans la fonction publique). Mais le COR avait déjà annoncé un déficit poche au début des années 2020.

La remise du rapport permet ainsi au Premier ministre de reprendre un débat qui a surgi à l’automne 2018, l’institution d’un âge pivot au-delà de l’âge légal de départ, qui permettrait d’obtenir une pension « au taux plein », c’est-à-dire sans pénalisation. C’est probablement une des mesures qu’il va retenir après la concertation de cet automne, en arguant qu’il est indispensable de lutter contre le déficit.

Est-ce opportun ? Non, pour plusieurs raisons.

La première est que le gouvernement donne le sentiment de se déjuger su ce sujet. A ceux qui suspectaient une réforme destinée à faire baisser les pensions, il a commencé par affirmer, en 2017, que les perspectives financières du système étaient bonnes et que ce n’était pas la question (le COR alors prévoyait déjà un déficit). Ainsi, dans une rubrique intitulée « Les idées reçues », le site consacré à la réforme des retraites affirmait à l’été 2018 que « les dernières réformes…ont permis de combler les déficits annoncés » et que, s’agissant de la retraite en France, « son financement est assuré ». Le gouvernement revient aujourd’hui sur cette affirmation, ce qui brouille le message adressé à la population.

Deuxième raison, l’instrumentalisation du COR est pathétique. Il suffisait de lire tous les rapports du COR précédents, il n’y a pas besoin de faire semblant de redécouvrir en novembre les vérités établies dès juin.

Troisième raison, plus une réforme est importante, globale, systémique, plus elle doit obéir à des justifications simples et compréhensibles. La ligne suivie jusqu’ici pour plaider la réforme était la simplicité et l’équité : il fallait en rester là.

Quatrième raison : les opposants les plus déterminés de la réforme sont les bénéficiaires des régimes spéciaux, qui y perdent. La population considère ces régimes comme des privilèges peu justifiés. Il aurait mieux valu isoler les opposants et éviter de pénaliser l’ensemble des salariés par l’annonce d’un report de l’âge effectif de la retraite, pour éviter qu’ils rejoignent la contestation.