Le Conseil d’Etat et l’évaluation des politiques publiques

La consommation en France : un bon niveau mais un constat pas si favorable
22 décembre 2019
Urgences hospitalières : des propositions (presque) nouvelles
5 janvier 2020

Le Conseil d’Etat et l’évaluation des politiques publiques

Dans le cadre d’un cycle de conférence sur son étude annuelle, Conseil d’Etat a tenu, cet automne 2019, deux conférences sur le thème retenu cette année, à savoir l’évaluation des politiques publiques. La première, en octobre dernier, a porté sur les enjeux, la deuxième, en décembre, sur l’expertise et les méthodes.  On peut visionner sur le site du Conseil ces deux conférences et prendre connaissance du dossier du participant. D’autres conférences suivront, en février, sur le partage de la compétence en ce domaine, en avril, sur les résultats obtenus, et en juin, sur les moyens de renforcer cette évaluation. S’agissant des enjeux, le dossier de la conférence inaugurale rappelle l’histoire de l’évaluation des politiques publiques en France, en partant de la lente évolution du Commissariat au plan et de la Cour des comptes, avec, par la suite, l’impulsion décisive donnée par Michel Rocard, qui entend faire de l’évaluation un outil de gouvernance, pour finir sur la LOLF et sur l’insertion dans la constitution, en 2008, de cette mission confiée au Parlement, qui s’est doté de divers Comités pour l’assumer. Le dossier témoigne du foisonnement des organismes en charge de cette évaluation, puisque le CESE y contribue officiellement depuis 2010 et que, en 2013, un organisme, France-Stratégie, prend la suite du Commissariat au plan, avec mission de procéder à des études en ce sens. France Stratégie anime également un réseau de 8 organismes, tous placés auprès du premier ministre (dont le COR, Conseil d’orientation des retraites et le CAE, Conseil d’analyse économique) qui, chacun dans son domaine, apportent leur contribution. D’autres experts notent qu’en France l’évaluation s’est développée au sein des services de l’Etat et que, aujourd’hui, ce sont des organismes qui lui sont rattachés qui fournissent le plus grand nombre d’études. Le discours d’ouverture du Vice-Président du Conseil d’Etat ne considère pas ce foisonnement comme une bonne chose : selon lui, une insuffisante institutionnalisation est responsable de la faible efficacité constatée. Il faudrait que le paysage de l’évaluation des politiques publiques soit moins éclaté pour être plus visible et en permettre une bonne exploitation. L’on peut cependant douter de la capacité du Parlement de piloter des évaluations systématiques et indépendantes. L’évaluation des politiques publiques souffre aussi, dit-il, de la résistance des décideurs politiques, qui appliquent un programme et ont du mal à revenir sur une décision inefficace. Renforcer le poids de l’évaluation consisterait d’abord à prendre la mesure de la faible qualité des études d’impact qui accompagnent les projets de loi, ensuite à généraliser les évaluations ex post et à favoriser les expérimentations. Au final, le mérite de ces premières approches est sans nul doute de souligner à la fois le développement des démarches d’évaluation et leur faible écho. Elles permettent aussi de s’interroger sur la mission confiée au Parlement, qui reconnaît l’exercer de manière trop limitée mais peine à s’imposer en ce domaine, sans doute parce que, à la différence des pays anglo-saxons, ses pouvoirs restent faibles en l’absence de réelle séparation des pouvoirs. Quant au lien entre évaluation et décision, il est très relâché et, quand les conclusions d’une évaluation s’imposent, c’est lentement. Il s’agit pourtant d’un enjeu essentiel de crédibilité de l’action publique mais elle aura du mal à rentrer dans les habitudes publiques.