La DARES a publié en février 2020 une étude sur l’utilisation du compte personnel de formation (CPF) en 2018 par les salariés. Il en ressort que le nombre de dossiers de formation déposés au titre du CPF augmente et que, en 2018, 383 000 entrées en formation ont eu lieu à ce titre, nombre désormais supérieur à celui des formations dont bénéficient à ce titre les demandeurs d’emploi (149 000) alors que, au départ, c’était le contraire (les demandeurs d’emploi avaient beaucoup mobilisé leur CPF, davantage que les salariés).
Rappelons l’historique du CPF et les espoirs mis dans ce dispositif. Le CPF, créé en 2014, remplace le DIF, droit individuel à la formation, créé en 2004. Les deux mécanismes reposent sur un principe comparable d’accumulation par année de travail, dans la limite d’un plafond, soit d’heures de formation, soit d’argent destiné à financer une formation, mobilisables à la demande. Le DIF et le CPF diffèrent cependant sur plusieurs points : la mobilisation du DIF devait faire l’objet d’un accord entre l’employeur et le salarié alors que la mobilisation du CPF est librement décidée par le salarié, sauf bien sûr s’il demande un abondement à l’organisme de financement de la formation professionnelle de la branche d’activité de son employeur ou à son employeur parce qu’il ne dispose pas du nombre d’heures suffisant pour financer la formation qu’il souhaite. Autre différence, le CPF, propriété personnelle du travailleur, est entièrement « portable » : il accompagne le salarié dans ses évolutions professionnelles, périodes de chômage comprises. De plus, il était entendu que le CPF devait participer à l’amélioration des compétences des personnes : la loi précise les certifications professionnelles auxquelles la mobilisation du CPG permet d’accéder, précisément pour que le CPF soit la plupart du temps qualifiant. C’était d’ailleurs un point de faiblesse du dispositif, puisque les formations qualifiantes exigent plusieurs centaines d’heures de formation alors que le plafond du CPF est, sauf exception, de 150 heures. Toutefois, pour donner plus de souplesse au dispositif, la loi permet aussi d’accéder grâce au CPF à des formations permettant d’acquérir des compétences « complémentaires » à ces qualifications.
Que dit le bilan du CPF établi par la DARES sur 2018 ? Le nombre des dossiers est en augmentation mais le recours au CPF ne concerne encore que 1,7 % des salariés, ce qui est modeste, avec bien sûr des différences entre les cadres (2,7 %) et les ouvriers (1 %). Or, en 2012, avant la création du CPF, le DIF concernait 4,7 % des salariés et ce bilan était considéré comme trop modeste par rapport aux espoirs mis au départ dans le dispositif. De plus, en 2018, 87 % des formations demandées ne sont pas associées à un niveau de qualification donnée et permettent aux salariés d’acquérir des compétences directement opérationnelles (langues, informatique et conduite). 13 % seulement sont diplômantes ou donnent un titre qualifiant. La durée moyenne des formations se raccourcit (88 heures en 2018), du fait aussi que les organismes de financement ont réduit leur abondement. Au final, le bilan quantitatif fait un peu douter des avantages du CPF qui au départ paraissaient clairs : il faudra suivre le bilan sur la durée et le compléter par un bilan qualitatif. Le CPF présente en effet un risque : en rendant le salarié autonome, il peut détacher le processus de formation professionnelle des besoins de l’entreprise et le salarié peut n’en tirer aucun profit pour son avancement professionnel. Si, en plus, le salarié n’acquiert pas de qualification professionnelle forte lui permettant de préparer l’avenir et si le dispositif profite peu aux demandeurs d’emploi, la déception sera grande.