Protection de la biodiversité : la lucidité du CAE

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Protection de la biodiversité : la lucidité du CAE

Une note du Conseil d’analyse économique, instance de conseil (rarement écoutée) du premier ministre, parue en septembre 2020, intitulée « Biodiversité en danger, quelle réponse économique ? », http://www.cae-eco.fr/staticfiles/pdf/cae-note059.pdf,  reconnaît avec franchise l’inefficacité des politiques de protection jusqu’ici mises en œuvre. Les écologistes qui martèlent la même analyse depuis longtemps ne seront guère surpris mais l’événement est important : une instance de conseil officielle appelle un chat un chat, analyse les raisons de l’échec et propose, pour redresser la situation, une politique autre que de vaines incantations ou que des mesures ponctuelles alibi.

Le constat tout d’abord : la biodiversité s’effondre, sans doute possible. Les rapports internationaux abondent et, en France, l’édition 2019 du rapport sur l’état de l’environnement établi par le Commissariat général au développement durable est très parlant : les habitats naturels sont globalement en mauvais état de conservation. Pour prendre l’exemple des oiseaux, les oiseaux communs dits spécialistes qui relèvent d’un habitat particulier ont diminué de 22 % depuis 1990. Les causes sont claires :  l’artificialisation des sols progresse, les écosystèmes sont fragmentés par les routes et les constructions et l’agriculture intensive les menace, tout comme la destruction des haies et la croissance des diverses pollutions. La surpêche menace de nombreux poissons, des espèces d’arbres disparaissent et des espèces exotiques nuisibles se développent.

Les politiques publiques sont faiblement efficaces, avec des causes identifiées : gouvernance éclatée ; fiscalité incitative aux dommages ; subventions à un système agricole qui précipite le déclin ; faiblesse des budgets de protection ; surtout, les objectifs sont fragmentés et portent sur la protection de quelques espèces et non pas sur celles des écosystèmes ; les crispations sur la chasse et l’agriculture sont paralysantes ; enfin, le choix d’une approche réglementaire coercitive est peu efficace car il n’est pas incitatif et les intérêts privés finissent toujours par l’emporter.

Les propositions sont donc logiques : il faut une protection plus globale des écosystèmes, une gouvernance plus unifiée (coopération entre l’Office national de la biodiversité et les collectivités) ; il faut intégrer des politiques diverses, eau, sols, environnement ; il faut remplacer une politique de réglementation inefficace, parce qu’elle appelle des contournements et des exceptions constantes, par une approche économique (financière, le « prix » devenant un signal) ; il faut ainsi conditionner les subventions publiques à la protection effective de la biodiversité, avec des objectifs quantifiés et des contrôles ; réduire les incitations fiscales à bétonner les sols ; réorienter les aides agricoles vers des contrats de conservation de la nature et de la biodiversité.

Des économistes s’intéressent enfin aux biens publics…