France Portrait social : les inégalités sociales frappent durement les enfants

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France Portrait social : les inégalités sociales frappent durement les enfants

Dans son ouvrage « France, Portrait social » (édition 2020 parue en décembre), l’Insee actualise toutes les grandes données statistiques sur l’emploi, le chômage, la scolarité, la démographie, les niveaux de vie, la santé, la qualité de vie, les dépenses sociales et les comparaisons européennes afférentes.

Y sont publiées également plusieurs études qui, cette année, portent sur les inégalités liées au premier confinement, sur la redistribution opérée par les mesures socio-fiscales adoptées en 2019 à la suite du mouvement des Gilets jaunes, enfin sur les inégalités entre mineurs de moins de 18 ans.

S’agissant de ce dernier sujet, l’Insee note d’abord que les inégalités sont liées à l’emploi des parents. En moyenne, 1 enfant sur 8 n’a aucun parent en emploi et la proportion monte à 1 enfant sur 3 dans les familles monoparentales, qui représentent aujourd’hui 20,6 % des familles (+ 6 points par rapport à 2003). Le risque de pauvreté (revenu disponible inférieur au seuil de pauvreté) en est bien évidemment accru : 4,7 % des enfants dont les deux parents travaillent sont pauvres et 75 % le sont lorsqu’aucun des deux n’est en emploi. Ce sont surtout les familles ouvrières ou employées qui sont touchées : 26 % des enfants de cette catégorie sociale vivent dans des familles où personne n’a d’emploi.

Dans le domaine scolaire, les parcours linéaires (sans redoublements ni réorientations) ont augmenté depuis 20 ans et davantage d’enfants obtiennent le baccalauréat. Les inégalités restent cependant marquées et évoluent peu. L’on peut ainsi distinguer plusieurs groupes parmi les élèves entrés en 6e en 2007 et les comparer à la cohorte de ceux entrés en 1995 : 52 % des élèves de la cohorte 2007 ont connu un parcours linéaire sans difficulté dans la voie générale ou technologique et 9/10 ont obtenu le baccalauréat « à l’heure ». Dans ce groupe, les enfants des familles favorisées sont surreprésentés mais moins que pour la cohorte 1995. Un autre groupe de 8 % est proche : le parcours des élèves concernés a été moins linéaire (redoublement) mais 9/10 ont obtenu le baccalauréat. Un troisième groupe  (16 %) a connu un parcours linéaire dans la voie professionnelle et 8/10 y sont devenus bacheliers. Les enfants d’ouvriers en représentent 50 % et y sont donc surreprésentés.

Restent les 20 % qui ont suivi un parcours court et heurté dans la voie professionnelle et les 4 % qui ont rencontré de grosses difficultés scolaires et sont souvent sortis tôt de la scolarité. Les enfants d’ouvriers et d’inactifs y sont fortement surreprésentés. Toutefois, ils sont plus nombreux à obtenir, au final, un diplôme, baccalauréat ou autre, que ceux de la cohorte 1995.

Enfin, l’étude rappelle que les inégalités sociales de santé apparaissent dès avant la naissance et s’amplifient dans l’enfance. Les femmes de catégorie sociale aisée fument moins pendant leur grossesse que les femmes moins favorisées, elles sont en moyenne moins corpulentes et dans une meilleure situation psychologique.  Dans les familles favorisées, les enfants de faible poids à la naissance sont moins nombreux. Par la suite, dès la maternelle, les enfants appartenant à des milieux sociaux modestes sont davantage en surcharge pondérale, passent davantage de temps sur un écran et ont davantage de caries que les enfants de catégories sociales plus aisées : ces différences perdurent en CM2 et en 3e. Ces mêmes enfants reçoivent moins de soins, notamment pour la correction de la vue et les soins buccodentaires, surtout de soins préventifs, pour des raisons de coût. Enfin, à 17 ans, le pourcentage de jeunes déclarant être  dans une santé satisfaisante est corrélé au milieu social, de même que les signes anxio-dépressifs, les pensées suicidaires et la prise de médicaments psychotropes.

Si l’on ajoute à ce tableau le constat selon lequel, à 3 ans et demi, les enfants d’origine modeste utilisent moins les dispositifs péri et extra-scolaires que les autres, l’on mesure combien les enfants sont loin d’être épargnés par les inégalités sociales :  malgré l’offre éducative et malgré un système de protection sociale qui affichent l’ambition de réduire les inégalités de départ, les inégalités qui les touchent reflètent celles qui frappent leurs parents.