Bilan démographique, les tendances de long terme

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Bilan démographique, les tendances de long terme

L’Institut national des études démographiques a publié, à la fin de 2020, comme chaque année, un rapport sur l’évolution démographique récente de la France qui présente l’avantage de souligner les tendances à l’œuvre depuis parfois plusieurs décennies. Que retenir ? Essentiellement l’évolution des grandes variables, natalité, mortalité, immigration.

S’agissant de la natalité, le nombre des naissances baisse à un niveau rarement atteint depuis la guerre (il ne devrait pas atteindre 750 000 en 2020). Cependant, même si le taux de fécondité baisse, c’est très lentement (il n’est passé, de 2013 à 2019, que de 1,999 à 1,87 enfant par femme). La baisse des naissances est due pour l’essentiel à la baisse du nombre des femmes en âge de procréer, reflet du creux de la natalité des années 80 et 90. Ce qui est préoccupant pour le maintien de la natalité, c’est le recul léger mais continu de l’âge de la maternité (baisse constatée depuis longtemps et qui atteint + 0,1 an chaque année depuis 2010) conjugué, depuis 2010 à une baisse de la fécondité après 30 ans. Or, la baisse de la fécondité avant 30 ans, liée au recul de l’âge des naissances, a longtemps été compensée par l’augmentation de la fécondité après 30 ans. Il est peu probable que cet indice remonte après 30 ans. La France est déjà un des pays européens qui a après 30 ans un des taux de fécondité les plus élevés (excepté l’Irlande), de même que l’âge au premier enfant est un des plus faibles. Il est plus probable que la natalité va tendanciellement baisser.

L’étude de la descendance finale montre qu’elle reste élevée (les femmes nées en 1980, qui ont eu 40 ans en 2020, devraient achever leur vie féconde avec un peu plus de 2 enfants en moyenne) mais les générations 85 connaissent un léger décrochage avec les précédentes à 32 ans, de même que la génération 95 décroche très légèrement entre 25 et 30 ans, prémisses d’une baisse très progressive.

Autre signe sans doute annonciateur d’une évolution. Longtemps, en France, l’écart entre les mères de familles nombreuses non diplômées et diplômées a été plus faible qu’ailleurs. En simplifiant, l’on avait coutume de dire que les familles nombreuses se situaient aux deux bouts de l’échelle sociale, même si la ligne était plus recourbée à un bout qu’à l’autre : en 1967, la proportion, parmi les femmes de  40 ans, des mères de familles nombreuses et bac +2 était de près de 15 points inférieure à la proportion des femmes de famille nombreuses sans diplômes. En 10 ans, de 1967 à 1977, la proportion des premières a baissé de 3,7 points et celle des secondes a augmenté de 5,7 points : la France se rapproche d’autres pays où les femmes diplômées choisissent moins d’avoir 3 enfants.

Sur la mortalité, l’année 2020 sera particulière, compte tenu des effets du COVID-19 : l’augmentation des décès liée à la pandémie entraînera mécaniquement une baisse de l’espérance de vie à la naissance (-0,2 an pour les hommes et -0,1 chez les femmes).

Jusqu’en 2019, le nombre de décès a augmenté du fait de l’arrivée aux grands âges de générations nombreuses et non de la dégradation de la santé.

Les évolutions de long terme sont les suivantes : la mortalité reste quasiment stable chez les moins de 15 ans, sachant que la mortalité infantile demeure non négligeable (3,6/00 en France métropolitaine) en comparaison de pays comparables (2,7 en Espagne, et moins de 2 dans la plupart des pays du nord de l’Europe). La mortalité néonatale (premier mois) est même en augmentation, sans doute du fait de la naissance de grands prématurés. Si la mortalité diminue de manière soutenue avant 45 ans, elle ne baisse après cet âge que de plus en plus lentement, notamment pour les femmes. La mortalité avant 65 ans (dite mortalité prématurée, souvent liée aux accidents ou aux insuffisances de la prévention sanitaire) baisse au final dans son ensemble mais c’est la mortalité après 65 ans qui déterminera de plus en plus dans l’avenir l’espérance de vie à la naissance.

Le cancer reste la première cause de mortalité, les taux de mortalité du fait de cette maladie ayant fortement baissé de 2006 à 2016 pour les hommes et faiblement pour les femmes. Cette évolution s’explique par l’augmentation de la mortalité féminine liée au cancer du poumon qui est en passe de devenir la première cause de mortalité chez les femmes. Les taux de mortalité entre sexes se rapprochent de ce fait. Ce sont toutefois les bons résultats d’ensemble de la lutte contre les cancers qui contribuent largement aux progrès d’espérance de vie.

 Le document enfin permet d’appréhender les grandes données sur l’immigration des pays tiers, hors ressortissants européens. Les flux sont difficiles à décompter, les statistiques d’attribution des titres du Ministère de l’Intérieur ne concordant pas avec celles des recensements de la population, qui lui sont inférieures, peut-être du fait des étudiants. Ces flux augmentent sur les années récentes (de 192 400 en 2013 à 249 500 en 2018). Il s’agit de flux de personnes jeunes (en 2018, 75 % ont moins de 34 ans), à dominante masculine (52 %, ce qui inverse la situation constatée en 2014) et qui sont majoritairement africaines (57 % en 2013 et 59 % en 2018). Le motif familial reste dominant mais sa proportion a baissé de 9 points depuis 2013 au bénéfice du motif professionnel (10,5 %), qui reste faible mais a beaucoup augmenté. Quant aux entrées humanitaires, leur proportion a augmenté jusqu’en 2017, de 8,2 % à 14,4 %, puis baissé en 2018.