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Elections régionales et départementales : quels enjeux?

La Fondation Jean Jaurès a fait paraître, le 10 mars 2021, un article documenté sur l’histoire des élections régionales et départementales et sur les enjeux de ces deux prochains scrutins, qui devraient avoir lieu, sauf report lié à des raisons sanitaires, les 13 et 20 juin prochains.

Les élections municipales de 2020 ont, malgré une abstention très élevée, marqué une dissociation entre la vie politique nationale, où s’affrontent trois forces politiques plus ou moins émergentes, le RN, la FI et LREM, et la scène locale, où ces trois champions ont bien plus de mal à être présents et où les partis traditionnels (Républicains et parti socialiste) montrent leur résilience, les Verts étant dans un entredeux encore mal assuré.

Cette dissociation n’est pas récente : l’histoire montre que, pour remporter les élections départementales et régionales, il vaut mieux depuis un bon moment être dans l’opposition nationale. La gauche n’a cessé de perdre des présidences de départements de 1982 à 1992, puis elle en a regagné progressivement jusqu’en 2011. Les élections de 2015 (marquées par un redécoupage des cantons et un changement des règles, renouvellement intégral des assemblées départementales et parité des candidatures dans chaque canton) ont marqué un très net reflux de la gauche, alors que la droite a progressé. Les élections régionales ont obéi à la même logique : les élections de 1986 et de 1992 ont marqué des pertes pour la gauche, celles de 1998 et 2004 seront des années de reconquête. La gauche perd également du terrain aux régionales de 2015, tout en limitant les dégâts plus que pour les départementales.

La seule période « atypique » est celle du gouvernement Jospin, où la gauche, au pouvoir au niveau national mais en cohabitation, ne perd pas aux élections territoriales.

Quelles sont les enjeux des prochaines élections ?

Politiquement, ils sont plus importants au niveau régional que départemental. Aux départementales, le Parti socialiste peut espérer quelques conquêtes tandis que la droite gardera sans doute l’essentiel des départements qu’elle gère. Aux régionales, les enjeux nationaux seront plus présents : pour le RN, l’enjeu est de conquérir une ou plusieurs régions où il a des bastions (plus de 30 % des voix aux européennes dans les Hauts de France et en PACA) mais aussi de conforter sa place dans des régions où il a entre 25 et 30 % des voix (Bourgogne Franche Comté, Grand-est, Occitanie). Il en a besoin pour marquer son assise dans le pays. La droite veut absolument empêcher la victoire du RN en PACA et dans les Hauts de France et conquérir, si possible, une région ou deux. Elle maintiendra sans doute son socle d’implantations, à quelques endroits près. Le Parti socialiste doit garder ses bastions mais sait que certaines de ses positions sont fragiles et qu’il rencontre des problèmes de cohérence entre son positionnement national et certaines de ses alliances locales.

La LREM  quant à elle se heurte également à des questions de cohérence (les majorités actuelles ont été dessinées avant sa création et certains élus de LREM y participent) et à l’éparpillement voire la faiblesse de ses forces de terrain. Elle voudrait au moins réunir suffisamment de voix au premier tour pour jouer un rôle au second. Quant aux Verts, pour l’instant, ils entendent être présents partout au premier tour pour conforter une image de « pôle politique » rassembleur des électeurs de gauche, qu’ils auront sans doute davantage de mal à jouer qu’aux municipales. Les socialistes vont leur demander dans certains cas une alliance pour éviter un éparpillement des voix dans les endroits où la droite est puissante.

Les questions principales sont d’une part celle de la cohérence entre les alliances départementales, régionales et nationales (la question des alliances du MODEM ou de LREM se pose mais la question existe aussi pour les Verts ou pour LFI…) et, d’autre part, l’ancrage de terrain. Les partis traditionnels (droite et parti socialiste) partent alors mieux armés. Le RN, les Verts, LFI et LREM partent avec un handicap certain, même s’ils ont, davantage que les deux grandes forces « anciennes », une « vision du monde » mieux identifiable.

Au final, la distorsion entre les scènes nationale et locale se confirmera sans doute, avec quelques différences avec les municipales : les Verts auront davantage de mal à percer parce qu’ils auront du mal à présenter des candidatures partout. La gauche montrera sa résilience surtout si elle parvient à s’unir. Quant au Parti communiste, il risque de disparaître des radars.

Enfin, question essentielle, quelle participation ? La participation électorale s’affaisse dans toutes les élections mais surtout aux élections territoriales, même si l’histoire n’est pas linéaire. Aux deux dernières élections régionales, l’abstention a atteint 49 % puis 42 % et, aux deux dernières départementales, 55 et 50 %.  Terra nova en conclut qu’il serait opportun de modifier les modalités de vote et d’introduire le vote par correspondance mais, sur ce point, malgré l’urgence, l’inertie prévaut.