Y a-t-il une politique de la jeunesse?

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Y a-t-il une politique de la jeunesse?

L’on ne sait pas très bien ce que recouvrent les termes de « politique de la jeunesse », que l’on est parfois tenté d’étendre à toutes les actions, dans les domaines éducatif, sportif ou culturel, qui concernent les jeunes, et que l’on réduit, le plus souvent, à l’accompagnement des jeunes vulnérables, ceux qui sortent du système éducatif sans diplômes ou qui ont du mal à s’insérer dans la vie professionnelle.

Pour ces derniers, il existe des politiques de l’emploi, qui n’ont cessé d’évoluer depuis 20 ans. D’une manière ou d’une autre, elles correspondent à des emplois aidés et/ou à des accompagnements vers l’emploi. La dernière version correspond à un plan « un jeune, une solution », qui a versé en 2021 des aides à l’embauche et a proposé des parcours personnalisés d’insertion, dont le ministère du travail tire aujourd’hui un bilan très positif. De fait, le taux de chômage des moins de 25 ans (20 % au 3e trimestre 2021) a baissé de 3,14 % par rapport à la même période de 2020 et de 1,2 % par rapport à 2019. Le nombre de demandeurs inscrits à Pôle emploi dans cette classe d’âge a retrouvé le niveau de 2019, un des plus bas depuis des années. Reste que, si l’on ne dispose pas de données récentes sur le taux de pauvreté des jeunes, les derniers chiffres, en date de 2018, qui figurent dans la collection Insee « Revenus et patrimoines », indiquent un taux nettement supérieur à la moyenne, 22,7 % pour les 18-24 ans et 15,7 pour les 25-29 ans, contre un taux national de 14,8 %. De plus, le baromètre d’opinion de la DREES paru en juillet 2021 note pendant la crise sanitaire une progression très forte du sentiment de pauvreté chez les jeunes de 18 à 29 ans, qui est passé de 2019 à 2020 de 20 à 26 %. Il est douteux que cette situation anormale ait beaucoup évolué depuis lors.

Pour combler le vide créé par le refus persistant d’ouvrir le RSA aux moins de 25 ans aux mêmes conditions que leurs aînés, il existe depuis 2013 une « garantie jeunes » mais ce dispositif est réservé à des jeunes qui ne sont ni en emploi ni en études ni en formation et sont en grande difficulté. Début 2021, le rapport du « Comité d’orientation des politiques de la jeunesse » placé auprès du CESE, qui portait sur l’évolution de la garantie jeunes, déplorait que le dispositif ne profite pas à tous ceux qui en avaient besoin, y compris des actifs précaires, voire des étudiants.

Le gouvernement avait alors annoncé avoir fait sien le principe d’une « garantie jeunes universelle », qui serait, selon le communiqué officiel, « mieux que le RSA jeunes », puisqu’elle garantirait à tout jeune en difficulté à la fois une aide financière et un accompagnement vers l’emploi. Alors qu’en 2021, le nombre de bénéficiaires de la garanties jeunes est estimé à 200 000, la ministre avait évoqué pour l’avenir un dispositif couvrant de 750 000 à un million de jeunes, voire davantage. En juillet 2021, le nouveau dispositif à créer a été baptisé « revenu d’engagement » et il a été précisé qu’il comporterait « des droits et des devoirs ». En octobre 2021, le dispositif annoncé, qui remplace la garantie jeunes, est devenu « contrat d’engagement ». L’on peine désormais à voir quelles différences existent avec la garanties jeunes précédente : les travailleurs précaires ne sont pas concernés, contrairement à certaines annonces et la cible est exactement la même que celle de la garantie jeunes (les NEET), tout comme la durée (en principe de 6 mois à un an, davantage mais exceptionnellement). Les conditions de l’accompagnement sont simplement plus précises et l’objectif, sans doute pour afficher une amélioration, est annoncé à 400 000 bénéficiaires, en allant chercher des jeunes qui sont « sous les radars » parce qu’ils sont éloignés d’un effort d’insertion.  Naturellement, la réticence à créer une vraie alternative à la garanties jeunes et une meilleure protection des jeunes s’explique par des raisons politiciennes : il s’agit toujours de séduire l’électorat de droite défavorable, par principe, à « l’assistanat ». Toute aide financière, serait-elle conditionnelle, serait-elle accompagnée d’un effort d’insertion, court donc le risque d’être présentée sous cette qualification dépréciative. Les pouvoirs publics refusent d’en faire bénéficier d’autres que les jeunes les plus perdus et les plus pauvres, ce qui revient à en exclure les jeunes en galère qui enchainent des CDD de survie et qui sont sans doute, pourtant, les plus « méritants ». La pauvreté des jeunes n’est pas près de baisser.