Plan de relance 2020 : les critiques de la Cour des comptes

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Plan de relance 2020 : les critiques de la Cour des comptes

La Cour des comptes a examiné les objectifs, la préparation, l’élaboration et l’exécution du plan de relance de 100 Mds décidé en octobre 2020, à la suite de la première phase de l’épidémie COVID. Le but du plan n’était pas seulement de relancer l’activité économique mais de la transformer : il comportait ainsi 3 volets, l’un consacré à la transition écologique, le second à la compétitivité (transformation du tissu productif et renforcement de la souveraineté dans des domaines jugés stratégiques) et le dernier au renforcement de la cohésion sociale et territoriale.

Le bilan de la Cour des comptes est très critique.

Le plan est d’abord difficile à lire. Il renforce les financements d’actions déjà lancées (rénovation des logements). Il apporte les financements à des actions annoncées  mais qui n’en avaient pas (investissements ferroviaires, Ségur de la santé). Il colmate des brèches qui n’ont rien à voir avec la relance (subventions exceptionnelles à France-compétences, création de places supplémentaires pour les néo-bacheliers, prise en charge des pertes de recettes de collectivités territoriales). Il finance, il est vrai, des actions nouvelles (développement de la filière hydrogène, aides à l’embauche des jeunes et aux contrats en alternance). Certaines actions sont toutefois le prolongement d’autres plans, comme celui des investissements d’avenir : la frontière n’est pas toujours claire avec ce programme et parfois pas avec le plan suivant, France 2030.

Le plan est donc difficile à apprécier : de très nombreuses actions y sont prévues, sans liste exhaustive. Les acteurs qui l’exécutent sont multiples, services centraux et déconcentrés de l’Etat, opérateurs et collectivités. Les Comités de pilotage foisonnent. Les modalités sont diverses et relèvent soit de la commande publique, soit d’une « aide guichet », soit des appels à projet. La gestion budgétaire en est complexe. Comme le financement est partagé entre l’Etat (86 Mds) et l’Union européenne (39,4 Mds) et que celle-ci conditionne ses financements à certaines réformes et à des cibles quantitatives, il faudra particulièrement suivre le respect de ces engagements.

Enfin, la cible des engagements à atteindre fin 2021 a été atteinte. L’exécution du plan est rapide, peut-être au prix d’une moindre qualité dans la sélection des projets.  Le gouvernement voudrait consommer la totalité des engagements fin 2022 et sans doute y parviendra-t-il.

De ces critiques, que retenir ? Le caractère fourre-tout du plan est choquant, de même que le recouvrement des actions entre plusieurs plans, qui fausse leur lisibilité et leur évaluation. Le développement de la filière hydrogène figure ainsi dans le plan de relance et dans France 2030. De plus, du fait de la complexité et du nombre d’actions, le dispositif de suivi de l’exécution n’est pas pertinent.

Cependant, il est difficile de reprocher au plan sa complexité (le plan de relance couvre toute une part de l’activité économique) ou sa rapidité d’exécution (c’est le but) et la suspicion d’un choix trop rapide dans les appels à projet devrait être étayée. De même, il est vrai que le niveau d’activité s’est redressé plus vite que prévu : dès le 3e trimestre 2021, l’activité économique était revenue à son niveau d’avant-crise. Dès lors, le plan de relance, moins indispensable, aurait peut-être dû être plus sélectif.

L’essentiel est ailleurs : le plus important bien sûr sera de mesurer l’efficacité des actions du plan et il faudra veiller à ce que le caractère désordonné du plan ne nuise pas à ce bilan. Un dispositif d’évaluation est prévu. D’ores et déjà, la Cour n’est pas convaincue de l’efficacité de certains dispositifs, comme MaPrimeRénov. En revanche, elle plaide pour la pérennisation de certaines mesures du plan : renouvellement forestier, rénovation énergétique des bâtiments de l’Etat. C’est cette évaluation de fond qu’il faut attendre.

Conclusion : l’empilement et l’enchevêtrement des plans d’investissement sont de mauvais signes, comme si la part de communication l’emportait sur la définition précise des objectifs. Rappeler l’Etat à l’ordre sur ce point est une bonne chose. Pour autant, le plan de relance semble bien avoir été utile : son évaluation est indispensable toutefois.

Enfin, au-delà de cette évaluation, il est préoccupant de constater que des actions nécessaires mais qui ne devraient pas en relever y figurent : les hôpitaux, les forêts, la modernisation des voies ferrées et l’entretien du patrimoine immobilier de l’Etat devraient relever des actions ordinaires de l’Etat et non pas d’un plan d’action exceptionnel.