Adapter la ville au dérèglement climatique : l’exemple de Paris

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Adapter la ville au dérèglement climatique : l’exemple de Paris

Une mission d’information et d’évaluation du Conseil de Paris a travaillé depuis plusieurs mois pour écrire un rapport « Paris à 50 °C », qui vient d’être publié. Le rapport souligne les risques : Paris est particulièrement exposé à l’effet « ilot de chaleur urbain » par sa densité, le caractère minéral des rues et des places et ses activités. L’impact des périodes de canicule peut être lourd pour les publics vulnérables, les travailleurs, la biodiversité, voire les réseaux de transport, d’électricité ou de télécommunications. Le rapport rappelle également les efforts déjà faits : trois plans climat depuis 2007 et un effort de végétalisation qui reste toutefois insuffisant (3m2 d’espaces végétalisés accessibles par habitant et 10,4 en comptant les bois, là où l’OMS recommande 12 m2 en proximité immédiate) et qui, au demeurant ne permet que d’atténuer la chaleur. Cette politique a été complétée par la création d’ilots de fraicheur (végétalisation, sol perméable, fontaines, zones ombragées), de lieux de baignade et une « débitumisation » volontariste. Pour autant, certains défis restent à traiter et ils sont énormes, notamment le bâti, 90 % des constructions à Paris n’étant pas conçus pour affronter un climat chaud.

Le rapport comporte des préconisations : réalisation d’écoles-oasis, avec végétalisation en pleine terre et matériaux non réfléchissants sur les sols restant imperméables, zones ombragées, rénovation du bâti avec des dispositifs de rafraichissement passif ; traitement à l’identique de certaines rues (notamment les rues étroites), avec végétalisation des façades, arbres à « couverture » végétale forte et ombrières ; une placette-oasis par quartier, avec pergolas, fontaines et brumisateurs ; plantation d’arbres, en diversifiant les espèces et en veillant à la bonne protection des piétons contre le soleil ; ouverture de 300 nouveaux espaces verts ; engagement enfin de rénovation du bâti : au-delà des normes de construction neuves (dont le rapport souhaite la révision), engagement de rénover 40 000 logements privés par an et traitement des toits avec collecte de l’eau, végétalisation résiliente et éventuellement peinture claire. Le rapport aborde également l’adaptation des rythmes de travail et de réalisation des travaux en ville pendant les pics de chaleur.

Le coût des aménagements prévus n’est pas chiffré : le rapport est encore un rapport d’orientation et non un plan directement opérationnel. Reste que les dépenses se chiffrent sans nul doute en Mds et qu’il serait essentiel de parler financement et échéancier.

Au-delà des projets parisiens, où en sont les collectivités en France sur la question de l’adaptation aux évolutions du climat ? L’on ne sait trop.

La France s’est dotée en 2018 d’un second plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC2) : une étude de l’IDDRI-Sciences-Po conclut que ce plan est trop général pour être utilisable. La « feuille de route, très peu directive » ne définit pas une politique d’ensemble d’atténuation des impacts climatiques. Le bilan de son utilisation effective par les collectivités n’est pas établi. Il existe bien un « Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique » dont un rapport de 2022 (La prospective au service de l’adaptation au changement climatique) mentionne les démarches et outils « à disposition » des acteurs ainsi que les actions de certains territoires, sans bilan d’ensemble ni définition d’actions à mener. Plus inquiétant, les experts (cf. notamment une note de l’I4CE, Mettre l’adaptation aux impacts du changement climatique au menu des discussions entre l’Etat et les collectivités, 27 janvier 2023) évoquent l’adaptation comme un projet à construire, même si nombre d’initiatives sont prises. En ce domaine aussi, il est temps de se mobiliser, d’évaluer les actions menées, d’aider les collectivités à définir un plan si elles ne l’ont pas fait et de travailler sur les questions concrètes d’application et de financement.