Logement : quelle politique pour répondre à la crise?

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Logement : quelle politique pour répondre à la crise?

En novembre 2022, le ministre en charge du logement, sur le fondement d’un diagnostic de crise, a lancé une réflexion d’ensemble, avec la réunion d’un CNR, conseil national de refondation sur la politique du logement.

Les inquiétudes des professionnels sont larges : malgré une forte demande, baisse de la production de logements, sociaux ou ordinaires, dans un contexte d’augmentation des taux d’emprunt pour accéder à la propriété et de hausse des coûts de construction. Il en ressort une difficulté d’accession à la propriété ; un allongement des files d’attente des demandeurs de logement social (2 millions en 2016, 2,4 millions fin 2022, dont un tiers environ de demandes émanant de  demandeurs déjà locataires d’un logement social) ; une augmentation du poids des dépenses de logement dans le budget des ménages, qui, au-delà des chiffres moyens fournis par l’Insee (28,5 % en comptant l’énergie et les charges) peut atteindre ou dépasser 40 % pour les plus modestes ; une difficulté des personnes à sortir du logement d’urgence faute de disponibilités dans le secteur social ; une difficulté à accéder au logement locatif ordinaire faute d’offre (les locations de courte durée empiètent sur les locations ordinaires, notamment du fait d’une fiscalité plus favorable sur les loyers et d’un meilleur rendement) ou faute de garantie jugée suffisante.

Les propositions des groupes de travail réunis dans  le cadre du CNR ont été très nombreuses : citons l’encadrement du coût du foncier par les collectivités ; le développement de l’acquisition de logements en BRS (avec une dissociation entre le foncier, qui reste propriété d’un organisme foncier, et le bâti, acquis par la personne) ; l’encouragement à la construction de logements sociaux plus « sociaux » ; l’ajustement dans le secteur social  des loyers de référence, sur lesquels sont calculées les aides au logement, aux loyers réellement pratiqués, pour solvabiliser davantage les habitants ; le développement du « Logement d’abord », politique d’insertion des personne sans domicile fixe par l’attribution d’un logement pérenne ;  l’ajustement de la fiscalité pour rendre plus coûteuse la détention de terrains à bâtir et moins favoriser les locations de courte durée ; une meilleure évaluation des besoins de logement ; le versement d’une aide aux communes qui s’engagent dans la construction de logements ; l’encouragement à des rénovations complètes de logements,  avec une loi de programmation et une banque de la rénovation.

Face à cet effort de réflexion, les mesures décidées par le gouvernement sont décevantes: attribution d’une rallonge budgétaire au « Logement d’abord » ; annonce d’un nouveau « pacte » avec les bailleurs sociaux pour le développement des constructions et des rénovations (mais apparemment sans moyens budgétaires supplémentaires) ; révision des zonages, notamment pour permettre le développement du logement intermédiaire ; extension de la garantie Visale destinée à faciliter l’accès au statut de locataire ; prolongement du PTZ, prêt à taux zéro, mais en le réservant aux zones tendues ; projet de révision des aides à la rénovation pour distinguer les « gestes » isolés et les rénovations plus ambitieuses ;  réflexion sur la fiscalité des loyers pour moins favoriser les locations de courte durée.

Les réponses gouvernementales sont donc ponctuelles : elles portent sur l’amélioration de dispositifs existants, avec des engagements plus flous sur le développement du logement social ou les évolutions fiscales. Elles sont peu innovantes et ne constituent pas les lignes de force d’une politique du logement, faute sans doute de volonté d’engager de nouveaux moyens financiers ou d’accepter des évolutions juridiques fortes (encadrement du coût du foncier). La crise du logement va, de ce fait, se poursuivre. Pourquoi faire travailler 6 mois tous les acteurs d’un secteur si l’on se contente d’un plan aux ambitions si minces ? Pourquoi mettre la lumière sur une crise grave si l’on n’a pas l’ambition de la traiter ?