CEDH : les animaux aussi ont droit à mourir sans souffrance

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CEDH : les animaux aussi ont droit à mourir sans souffrance

Dans un arrêt du 13 février 2024 (non définitif toutefois), la CEDH, saisie par des organisations juives et musulmanes, a considéré que l’interdiction édictée en Flandre et en Wallonie par les autorités régionales de procéder à un abattage rituel d’animaux sans étourdissement préalable n’était contraire ni au droit à la liberté religieuse ni à l’interdiction de non-discrimination inscrits dans le texte de la Convention.

La Cour reconnaît que la décision d’interdiction constitue bien une ingérence dans la liberté religieuse.

Cependant, comme toujours, l’avancée juridique tient à une interprétation extensive des textes, en l’occurrence l’article 9 de la Convention qui garantit le doit à la liberté religieuse. L’article indique en effet que les restrictions à un tel droit ne peuvent être édictées que dans certains cas : « La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d’autrui ». Dans ce texte, rien n’évoque donc la souffrance animale et ce sont plutôt des considérations de protection de l’ordre et du vivre ensemble qui sont mentionnées pour réglementer les pratiques religieuses. Or, la Cour a considéré que la décision d’interdiction est justifiée dans son principe parce que la protection du bien-être animal est un élément de la morale publique : en édictant les règles qui obligent à étourdir un animal que l’on va abattre, les autorités publiques n’ont donc pas outrepassé leurs marges d’action. Quant au principe de non-discrimination, il est respecté puisque les décisions prévoient que des modalités particulières peuvent s’appliquer à l’abattage rituel, notamment l’étourdissement réversible qui n’entraîne pas la mort.

La décision de la CEDH complète un jugement préalable de la Cour de Justice de l’UE de 2020 qui, de manière plus souple, laissait les États décider de la conciliation entre le respect des prescriptions religieuses et le respect du bien-être animal.  Pour autant, l’arrêt n’est pas prescriptif et n’entraîne aucune obligation de recourir à l’étourdissement préalable dans tous les pays adhérents à la CEDH. Elle constitue cependant une incitation à modifier la réglementation dès lors qu’elle considère comme légale l’interdiction de tuer sans étourdissement et invoque « la morale publique ». En France, un député, P. Juvin, a d’ores et déjà déposé, à raison, une question écrite interrogeant l’État sur ses intentions, soulignant la cruauté de la mort sans étourdissement et demandant que l’étourdissement devienne obligatoire, y compris pour les abattages rituels.