Le Président de la République a annoncé vouloir, sur le quinquennat, baisser de 3 points les dépenses publiques, qui représentent en France 56,4 % du PIB, soit 10 points de plus que la moyenne de l’Union. L’ambition paraît énorme (aujourd’hui 3 points de dépenses publiques représentent 67 Mds) : elle est justifiée par la volonté d’alléger le poids de la dette et de baisser les prélèvements obligatoires, en rendant de ce fait le pays plus attractif. France Stratégie a reçu commande non pas d’étudier la faisabilité d’une telle baisse mais de rechercher si d’autres pays avaient déjà réalisé cette ambition, volontairement et non pas sous la seule contrainte des marchés. La note de France Stratégie de mai 2018 (« Baisser le poids des dépenses publiques, les leçons de l’expérience des pays européens »), commence par rappeler les justifications de la baisse : en eux-mêmes, les écarts entre pays sur l’ampleur des dépenses publiques ne sont pas, dit-elle, choquants : ils témoignent de choix politiques différents. La France a choisi de « socialiser » fortement les dépenses d’Education, de santé, de retraite et cela explique pour une très grande part l’importance de ses dépenses publiques. Cependant, comme il est patent que le système présente des déficiences et que la qualité n’est pas à la hauteur des financements, France Stratégie considère que la baisse de telles dépenses se justifie. Elle assainirait en tout cas les finances publiques, appelées sans doute, avec la hausse probable des taux d’intérêt, à supporter une charge de dette plus élevée. Après ce préambule, la note répond à la question posée : plusieurs pays européens sont parvenus dans le passé, dit-elle, à réduire de 2 ou 3 points leurs dépenses publiques hors pression des marchés financiers (la Grèce et l’Espagne l’ont fait, mais sous contrainte). La Suède et la Finlande n’y sont toutefois parvenues qu’en réduisant leurs dépenses sociales, solution à laquelle l’Allemagne a ajouté une réforme énergique du droit du travail qui a, entre autres, créé les « mini-jobs ». Le Royaume-Uni a réduit les dépenses d’éducation, de Défense, de politique familiale. Les Pays-Bas ont réduit les dépenses des services généraux mais également la protection maladie. La conclusion d’ensemble est qu’il est possible de baisser fortement les dépenses publiques mais en touchant à la protection sociale. Ce que ne dit pas France Stratégie, c’est que le document d’orientation présentant la démarche tendant à baisser ces dépenses, Action Publique 2022, s’il a bien envisagé que des clarifications soient effectuées entre les compétences de l’Etat, de la sécurité sociale et des collectivités, s’il demande également des réductions d’emploi public, n’a jamais précisé explicitement qu’il envisageait, pour réduire de 3 points les dépenses publiques, de toucher à la protection sociale. L’on verra ce que dit le plan d’action, qui devrait être arrêté cet été. De fait, sachant que les suppressions d’emplois de la période RGPP ont rapporté 5 Mds, on ne voit pas bien comment l’on pourrait économiser près de 70 Mds sans taper dans les grosses masses de la protection sociale. Seconde remarque : la recherche des inefficiences de la protection sociale est une voie opportune. Nous dépensons trop pour une protection sociale qui n’évite pas les gaspillages en santé et sert en retraite des prestations parfois très favorables. Pour autant, traquer les gaspillages sans trop réduire la protection, c’est long et politiquement difficile. La conclusion est toute simplette : on peut baisser de 3 points les dépenses publiques, mais il faut réduire la protection sociale et disposer alors d’un consensus social clair ou d’un grand courage et de beaucoup de temps. Le chantier sera donc bien compliqué.