Le projet de loi ELAN (loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique), en cours d’examen à l’Assemblée nationale, comporte des dispositions qui annoncent un retour de l’encadrement des loyers, dispositif mis en place par la loi ALUR (loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové) du 24 mars 2014 et, à l’époque, fortement contesté. Le système, fondé sur un réseau d’observatoires locaux agréés par l’Etat, devait stabiliser les loyers autour de leur niveau médian dans les zones dites tendues. Dès l’été 2014, face à la grogne du milieu immobilier qui, contre tout bon sens, imputait à la loi (quelques mois après son vote et avant son entrée en vigueur…) le fléchissement de la construction en 2013 et 2014, le Premier ministre, Manuel Valls, a annoncé que l’encadrement des loyers prévu par la loi ne serait pas appliqué, sauf avis favorable des maires, ce que la loi n’a jamais prévu. De fait, si des observatoires des loyers ont été créés dans quasiment toutes les agglomérations des zones tendues où ils devaient l’être, les pouvoirs publics ont soigneusement évité de les agréer, décision qui, selon la loi, aurait conduit à instituer automatiquement l’encadrement des loyers dans la zone couverte. La décision, dans une République généralement considérée comme non bananière, laisse rêveur : le Premier ministre a décidé qu’il n’appliquerait pas une loi qui ne lui plait pas. Par la suite, la loi a été mise en œuvre dans deux communes volontaires, Paris et Lille mais, en 2017, la justice administrative a annulé ces mises en œuvre, la loi prévoyant que l’encadrement devait s’opérer, non pas à l’échelle des communes, mais des agglomérations (voir notamment Conseil d’Etat, 15 mars 2017). Le projet de loi Elan (article 48) prévoit la généralisation des observatoires de loyers dans les zones « où il existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements », avec un niveau élevé des loyers, dont la liste sera établie par décret. La présentation du projet de loi précise bien toutefois que ces dispositions n’emportent pas automatiquement encadrement des loyers dans ces zones. En revanche, un autre article (l’article 49 du projet) prévoit qu’un tel encadrement est mis en place par arrêté préfectoral, dans des territoires de forte tension locative, dès lors que les collectivités ou EPCI compétents dans le domaine de l’habitat le demandent, mais, pour l’instant, à titre expérimental. Une sanction est prévue pour les bailleurs ne respectant pas le dispositif.
Sur le fond, est-ce une bonne décision ? Faut-il réduire le différentiel de coût en plafonnant les loyers dans les zones tendues ? C’est de bon sens : c’est en effet l’augmentation des prix du privé qui pèse sur le logement social. Elle renforce la difficulté d’accéder au logement ordinaire pour un grand nombre de ménages. Certes, le dispositif d’encadrement vient tard (les hausses sont engrangées et sont moins fortes depuis quelques années) et il est techniquement compliqué. Mais il est utile.