revenu universel d’activité: vers un périmètre large…

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revenu universel d’activité: vers un périmètre large…

Le plan pauvreté de novembre 2018 a inscrit dans ses objectifs la création d’un Revenu universel d’activité (RUA)destiné à simplifier les droits sociaux (et donc à améliorer leur accès) tout en les rendant plus équitables et plus incitatifs à la reprise d’une activité. Après un état des lieux sur les dispositifs de soutien au revenu des ménages modestes, la concertation s’est ensuite ouverte sur ce projet très imprécis, d’abord auprès des institutions puis plus largement, auprès des citoyens, avec des questions générales (Pourquoi le RUA ? A qui devrait-il s’adresser ? Comment devra-t-il fonctionner ?) donnant l’illusion que les participants allaient définir eux-mêmes la future prestation. Le 7 novembre, le ministère a diffusé une note sur le « périmètre de la nouvelle prestation », ouvrant ainsi un 3e cycle de concertation. Restera ensuite à définir le « parcours de l’allocataire », la gouvernance et le financement, avant le dépôt d’un projet de loi en 2020. L’enjeu est important : 4,22 millions de personnes bénéficiaient d’un minimum social en 2018, 7 millions en comptant les ayant-droit.

Que dit la note du ministère ? Elle définit d’abord ce que devrait être, selon elle, le périmètre a minima de la nouvelle prestation, qui fusionnerait RSA, prime d’activité et aides au logement.  Ces aides sont toutes soumises au revenu mais la définition des revenus pris en compte est différente pour les allocations logement. De plus, les 3 aides sont dégressives avec les revenus, mais pas identiquement. Pour les aides au logement, le travail « ne paye pas » de la même manière selon les ménages. Il est donc proposé de construire une prestation unique avec une harmonisation du calcul des ressources et de la dégressivité, constitué d’une prestation socle (l’ex RSA), d’un supplément logement (ouvert même si le ménage n’a pas droit au socle) et d’un intéressement à l’activité. La note plaide ensuite pour une intégration plus large dans le RUA, sur les mêmes principes, de l’allocation de solidarité spécifique destinée aux chômeurs de longue durée, de l’ASPA (un supplément « personnes âgées s’ajouterait au socle), de l’AAH, allocation aux adultes handicapées, de l’ASI (allocation supplémentaire d’invalidité, voire des aides aux jeunes de moins de 25 ans (avec, sur ce point, plusieurs scénarios). Chemin faisant, un nombre important de questions sont posées sur l’éventuelle modification des prestations absorbées, meilleure prise en compte des différences de coût des logements sur le territoire, articulation entre l’ASPA et le minimum contributif de pension, maintien ou non de la récupération sur succession pour l’ASPA, spécificité de l’intéressement au travail pour les personnes handicapées, modalités de l’extension du dispositif aux jeunes.   Resterait ensuite à choisir la « base ressources de la nouvelle prestation (quels revenus pris en compte et comment), la période de référence, la fréquence de réévaluation.

Une telle note, très technique, est aussi très ambitieuse : elle ambitionne une simplification radicale des aides en veillant à ce que les bases ressources prises en compte soient identiques et que les montants versés tiennent compte à l’identique de la progression des revenus du travail. L’approche est en première analyse intéressante, même s’il y a fort à parier que le lien entre le versement de prestations et la progression des revenus du travail n’est pas perçu par les allocataires dans toute sa complexité : les effets d’incitation ou de désincitation au travail existent peu de ce fait. Pour autant, les associations et le grand public ne peuvent rien faire de ce travail de réflexion. Il est légitime de construire une prestation sur des principes mais il est légitime également de veiller, surtout s’agissant des aides sociales versées aux personnes démunies ou modestes, aux conséquences de la réforme et aux gains ou aux pertes qu’elle va enclencher. Tant que cet aspect n’aura pas été traité (il nécessite un travail de simulation que le ministère a certainement entrepris), tant que les chiffrages ne seront pas disponibles (la réforme est censée se faire à moyens constants), tout travail sur le RUA restera incomplet et frustrant.