Dans les territoires, un sentiment d’abandon, mais pas la volonté de partir

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Dans les territoires, un sentiment d’abandon, mais pas la volonté de partir

Les échanges sur les politiques à mener pour établir une plus grande égalité territoriale opposent les économistes qui souhaitent développer l’attractivité des territoires délaissés, ceux qui insistent pour que les personnes soient plutôt encouragées à rejoindre les zones d’emploi plus dynamiques, et ceux qui veulent au moins diminuer l’inégalité des chances territoriale en augmentant la part des populations diplômées ou formées, traditionnellement faible, dans les régions en déclin économique. Le Commissariat général à l’égalité des territoires a demandé au Credoc de mesurer l’opinion des Français sur la situation de leur territoire et d’approfondir leurs aspirations. Les résultats (publiés par le CREDOC en octobre 2017, sachant que le CGET avait publié une note dès juillet 2017 intitulée « Soutenir les territoires en crise ou bien aider leurs habitants à s’installer ailleurs ? ») ne sont pas très surprenants : 28 % des Français au total ont le sentiment de vivre dans un territoire délaissé. L’étude souligne que ce sentiment est beaucoup plus prononcé dans les communes isolées situées hors de l’influence des pôles urbains (45 %) ou dans celles qui relèvent d’une aire urbaine petite et moyenne ((44 %). La surprise, c’est que le sentiment d’abandon existe aussi de manière non négligeable (25 %) dans les communes situées dans une grande aire urbaine : il est vrai que les réponses sont fortement influencées par la situation personnelle des personnes, les personnes pauvres, non diplômées et demandeurs d’emploi ayant davantage le sentiment de vivre dans un territoire délaissé. 35 % des personnes qui se sentent délaissées envisagent d’aller vivre dans une autre ville où leur situation pourrait s’améliorer. Cependant la première motivation d’un éventuel déménagement est, et de loin, la volonté d’améliorer le cadre de vie avant les perspectives professionnelles. De plus, ce sont les jeunes et les personnes qui ont confiance dans l’avenir qui sont les plus nombreux à avoir ce projet, dont on ne peut donc pas dire qu’il est vu comme une solution partagée, d’autant que la mobilité réalisée (souvent le fait des personnes les mieux armées en terme professionnels) est bien inférieure à la mobilité envisagée. En fait, la volonté de stabilité résidentielle domine largement : 75 % des Français et 77 % des personnes qui disent vivre dans un territoire délaissé attendent une politique de développement de leur territoire bien plus que des aides à la mobilité (23 %), avec, au premier rang, la demande d’aides à l’installation d’entreprises puis du développement des services publics (santé et transports surtout). A vrai dire les habitants pouvaient-ils répondre autrement et balancer entre une réinstallation coûteuse et incertaine et une demande aux pouvoirs publics de développer l’emploi local ? L’enquête n’est pas inintéressante mais l’on peut s’interroger sur son utilité : est-il encore temps de poser des questions dont on connaît la réponse ou d’élaborer une politique d’égalité des territoires dont on a aujourd’hui du mal à percevoir les contours ? Le Sénat a publié en mai 2017 un rapport sur l’aménagement du territoire qui fait le constat de l’abandon de cette ambition depuis 20 ans. Dont acte, sachant que le retour à l’aménagement du territoire traditionnel est sans aucun doute une illusion. Mais à la place, quoi ?