Taxe carbone, une taxe incontournable

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Taxe carbone, une taxe incontournable

Le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) a publié en ce mois de septembre un rapport sur « La fiscalité environnementale au défi de l’urgence climatique ». Il y développe un plaidoyer d’une rationalité stricte en faveur de la relance de la taxe carbone, dont la trajectoire d’augmentation a été cassée en 2019, son gel ayant été décidé à la suite du mouvement des gilets jaunes. Le rapport, contrairement à son titre, n’est pas centré sur l’ensemble de la fiscalité environnementale : celle-ci fait l’objet d’un rapport annexe et, au demeurant, mérite un regard spécifique, tant elle est complexe et hétérogène. La taxe carbone est simplement située dans cet ensemble (9 Mds dans une fiscalité « environnementale » de 56 Mds). Le raisonnement du CPO est le suivant : la France s’est dotée d’objectifs ambitieux de réduction des émissions de gaz à effet de serre, objectifs qu’elle vient d’augmenter encore dans la récente loi Energie climat qui fixe une cible de neutralité carbone à horizon 2050. Dans son rapport de juin 2019, le Haut Conseil pour le climat note que le rythme actuel de réduction est deux fois trop lent par rapport aux objectifs visés. Il est donc inévitable de renforcer les outils disponibles et de réfléchir aux moyens de concilier l’inévitable augmentation de la taxe carbone et la réponse aux inconvénients présentés : ceux-ci sont aujourd’hui nombreux. D’abord, avant le gel de 2019, la courbe de croissance de cette taxe était très rapide, bien plus rapide que celle d’un pays exemplaire comme la Suède qui l’a fait augmenter plus doucement mais, il est vrai, est partie beaucoup plus tôt. Ensuite, cette augmentation peut dégrader la compétitivité des secteurs qui y sont exposés et risque d’accroître le volume de carbone importé (en tenant compte des importations, l’empreinte carbone de la France est 1,7 fois plus importante que les émissions nationales et a augmenté de 7 % depuis 1995). La tarification du carbone est de plus inégale, relevant soit de cette taxe, soit de marché de quotas, avec des exonérations ou réductions qui posent question. Enfin, la taxe carbone est régressive avec les revenus et pèse davantage sur les foyers les plus modestes ou les plus éloignés des villes et l’utilisation des recettes manque de transparence.

Les simulations auxquelles le CPO s’est livré montrent en outre que, si le maintien au niveau actuel de la taxe carbone ne permet, en 2030, qu’une réduction de GES de 25 % contre les 40 attendus, une augmentation modérée (100€/tonne en 2030) ou forte (250€ la tonne à cette même échéance) ne permettrait pas non plus d’atteindre la cible visée (respectivement -29 % et -34 % de baisse). Ces résultats, joints à l’analyse des inconvénients mentionnés supra, conduisent à définir les conditions indispensables à la relance de la taxe : d’une part, que son augmentation soit insérée dans une stratégie d’ensemble. Cette première exigence implique que l’augmentation de la taxe soit cohérente avec les objectifs inscrits dans la loi, que son assiette soit élargie (remise en cause des exonérations et réductions), qu’elle s’articule de manière cohérente avec le marché des quotas, qu’elle soit complétée par des outils de politique environnementale allant dans le même sens (taxe poids lourds par exemple). D’autre part, des mécanismes de compensation sont à prévoir pour les ménages les plus affectés, sans pour autant encourager le recours à des énergies fossiles, contraire au but recherché. Enfin, il est nécessaire que cette politique se situe dans un cadre européen voire international : harmonisation du cadre de la taxation du carbone, institution d’une taxe carbone aux frontières, suppression de l’exemption fiscale des carburants des transports internationaux. La démonstration est implacable : il va devenir de plus en plus difficile d’augmenter les ambitions tout en limitant parallèlement l’effet des outils permettant de les atteindre.