Musulmans en Europe: légalistes mais discriminés

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Musulmans en Europe: légalistes mais discriminés

L’Agence européenne des droits fondamentaux, la FRA, composée de  juristes et d’experts compétents en sciences sociales et politiques, publie en septembre 2017 une étude sur « Les musulmans dans l’Union européenne », fondé sur les réponses à un questionnaire de 10 500 personnes se réclamant de l’islam et vivant dans 15 pays d’Europe, immigrés ou descendants d’immigrés. Il en ressort que les trois quarts d’entre eux sont attachés à leur pays d’accueil. La proportion de ceux qui ont une confiance totale dans la police (6.6 sur 10) est identique à celle de la population d’ensemble. Cette proportion est supérieure s’agissant de la confiance dans la loi. Les musulmans sont plutôt ouverts aux autres groupes de religion et d’origine différentes : seuls 17 % sont hostiles aux mariages mixtes et 23 % ne se sentent pas à l’aise avec l’homosexualité (les femmes étant, sur ce point, plus tolérantes). Cependant, ils se plaignent de discriminations (25 % des personnes en ont subi l’année précédente, 39 % dans les 5 années précédentes), mais peu (21 %) se sont plaints à une quelconque autorité (la majorité à leur employeur). 27 % ont subi des actions de harcèlement l’année précédente, dont 45 % dans une proportion importante (6 actes ou davantage). Les femmes et les personnes de la seconde génération en relatent davantage. La grande majorité de ceux qui ont relaté l’incident à la police n’ont pas été satisfaits de la réaction. Les musulmans d’Europe (surtout les jeunes) se plaignent au demeurant de contrôles policiers fréquents qu’ils imputent à leur apparence et à leurs vêtements.  Le constat est malheureusement d’une grande banalité : il est très proche de celui effectué dans l’étude réalisée en France par l’Insee en 2008, Trajectoires et origines, sur les immigrés et les enfants d’immigrés. Au demeurant, certaines données de l’étude concernant la France sont plus sombres : les musulmans en France expriment plus qu’ailleurs l’opinion que les discriminations sont répandues, un pourcentage inférieur a totalement confiance en la police (5,8 contre une moyenne de 6,6/10, la Finlande caracolant en tête avec 8,4 !) et ils sont bien plus nombreux à considérer que les contrôles policiers sont discriminatoires. La petite note d’humour involontaire est apportée par Frans Timmermans, Vice-Président de l’Union, qui se déclare « déconcerté » par le faible pourcentage des personnes qui ont porté plainte pour discrimination. Frans Timmermans est un responsable estimable, qui lutte contre les politiques de violation des droits fondamentaux en Pologne ou en Hongrie. Il n’en témoigne pas moins d’une certaine naïveté. Les discriminations sont partout très difficiles à combattre. Le droit est clair mais les victimes ne portent pas plainte parce que, quand elles le font, elles n’ont souvent pas de preuve. De plus, l’opinion publique méconnaît la gravité des faits lorsque les discriminations sont implicites, simplement verbales ou ne se traduisent que par de l’humiliation publique. La Fra a, en tout cas, du pain sur la planche : elle vient de publier deux autres dossiers « L’Europe s’investit-elle suffisamment pour protéger les droits fondamentaux ? » et, dans son rapport d’activité 2017, « Combler l’écart entre les politiques et la réalité ». Allons, courage.