P. Gattaz, contrôler les chômeurs tous les jours?

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P. Gattaz, contrôler les chômeurs tous les jours?

Pierre Gattaz, le Président du Medef, a déclaré cette semaine qu’il fallait intensifier les contrôles sur les chômeurs, éventuellement tous les jours. Le caractère outrancier de cette proposition a fait rire (suscitant des émulations sous la mention “FaistonGattaz”) mais en réalité, elle fait écho aux phantasmes récurrents d’une part de la classe politique. Lors de la campagne électorale, Emmanuel Macron avait annoncé que les demandeurs d’emploi, sous sa présidence, ne pourraient pas refuser plus de deux offres d’emploi correspondant à leurs compétences (l’ennui est que c’est exactement la règle en vigueur) et que les contrôles seraient renforcés (ils le sont depuis 2015, sans résultats probants). Relisons sur ce sujet un « Policy brief » de l’OFCE du 7 juillet 2017 : le document www.ofce.sciences-po.fr/pdf/pbrief/2017/pbrief21.pdf rappelle tout d’abord que le contrôle de la recherche d’emploi n’a rien de choquant en soi et que, lorsque l’assurance chômage était gérée par des mutuelles ouvrières, au XIXe siècle, il était très strict. Faut-il l’intensifier aujourd’hui, alors même qu’il coûte cher et monopolise des forces dont Pôle emploi aurait bien besoin pour faire son métier, l’accompagnement des demandeurs d’emploi ? Plusieurs arguments tendent à répondre par la négative. Les études existantes (notamment celle de B. Coquet en 2013, dans un ouvrage sur le chômage paru chez L’Harmattan) montrent qu’il n’existe pas de réticence généralisée à la reprise d’emploi. En outre, les emplois durablement vacants (500 000 environ) ne sont pas pris non plus par les demandeurs d’emplois non indemnisés, qui représentent environ la moitié des demandeurs d’emploi inscrits, ce qui tend à montrer que leur non occupation ne s’explique pas par le « confort » des allocations de chômage. De plus, chaque mois, 3,3 millions de contrats de travail sont signés, dont 2,75 millions portent sur des offres qui ne sont pas particulièrement séduisantes puisqu’elles durent moins d’un mois et ne sont pas très bien rémunérées : or, les demandeurs d’emploi les acceptent massivement. 44 % des demandeurs d’emploi sont d’ailleurs en activité réduite, acceptant des emplois de mauvaise qualité à temps partiel. A quoi bon, dit l’OFCE, consacrer de l’argent à un renforcement du contrôle ou des sanctions si parallèlement le nombre d’emplois occupés ne doit pas augmenter ?  La réponse est de bon sens. Cependant, à mieux y réfléchir, il n’est pas totalement inutile de contrôler les chômeurs, au moins de temps en temps : comme l’a montré l’expérimentation d’augmentation des contrôles menée en 2013 avant la généralisation de 2015, certains chômeurs découragés prennent conscience à cette occasion qu’ils se laissaient aller et se remobilisent. Si le contrôle est un rappel des obligations et débouche sur un meilleur accompagnement, il est utile. Mais ce n’est pas le contrôle qui fournira des emplois.