Consommation de drogue: amende délictuelle ou plus si récidive?

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Consommation de drogue: amende délictuelle ou plus si récidive?

Un rapport de l’Assemblée nationale du 25 janvier 2018 traite, sur demande du gouvernement, de l’application d’une amende forfaitaire au délit d’usage illicite de stupéfiants.

Le rapport se veut pragmatique : la réponse pénale aux délits constatés en 2016 est insatisfaisante puisque 65 % des mesures sont de simples rappels à la loi qui n’ont pas de véritable impact dissuasif. Or, cette réponse inefficace prend du temps et le recours à une amende pénale serait plus rapide, plus efficace, plus égalitaire et plus économe pour l’Etat. Reste deux difficultés à résoudre : le montant de l’amende d’une part (qui devrait faire l’objet d’une expérimentation), le sort à réserver aux nombreux mineurs interpellés d’autre part (sur 153 241 personnes mises en cause en 2016, 17 % étaient mineures). Les deux rapporteurs se sont cependant divisés sur un autre point : la nature de l’amende, délictuelle (qui permet des mesures de garde à vue et un crescendo pénal plus dur dans certains cas, par exemple en cas de récidive) ou contraventionnelle, sanction qui resterait uniquement financière. Comme souvent, le pouvoir politique ne veut pas trancher nettement et redoute plus que tout une mesure qui pourrait être présentée comme une « dépénalisation ». Il veut le beurre (la simplicité et l’allègement des tâches des fonctionnaires de police et des magistrats) et l’argent du beurre (la peur de la détention). Le ministre de l’intérieur a donc annoncé que la loi de 1970 qui prévoit une possibilité d’emprisonnement d’un an et une amende très élevée ne serait pas abrogée et qu’elle serait appliquée dans certains cas (éventuellement récidive). Exit la simplicité et la rapidité, bonjour le retour à l’appréciation quelque peu arbitraire des forces de l’ordre, aux gardes à vue, à l’appel aux magistrats, car il est douteux que les personnes mises en cause soient des consommateurs occasionnels. Les pouvoirs publics montrent, dans ce débat, un double visage, gestionnaire d’un côté, répressif de l’autre. Or, aucun des deux n’est satisfaisant : le rapport est muet sur le débat sanitaire et sociétal que pose la consommation de drogues (essentiellement celle du cannabis parce que c’est la plus répandue) et les voies pour le résoudre. Certes, les réflexions sur ces thèmes se sont accumulées depuis des décennies sans rien changer à l’archaïsme de la situation et réexaminer des options mille fois évoquées peut paraître inutile. Il reste malgré tout inapproprié de débattre entre deux options inadaptées, la réduction à une infraction banale qui n’empêche rien et continue à favoriser le trafic ou une répression qui n’a pas de sens et est inapplicable. En tout état de cause, la santé et la justice ont sans doute quelque chose à dire. En réalité non : les deux ministres santé et justice trouvent l’une et l’autre très opérationnelle le projet d’amende délictuelle. Définir une politique, c’est parfois refuser avec ténacité de changer grand-chose à la précédente, serait-elle unanimement décriée.