Fraude fiscale: la nouvelle loi

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Fraude fiscale: la nouvelle loi

Depuis la création en 2013, d’un parquet national financier dont la mission est notamment d’intervenir dans les affaires de fraude fiscale complexe, le ministère de la justice s’est insurgé de plus en plus ouvertement contre le « verrou de Bercy », disposition du Livre des procédures fiscales qui ne permet à la Justice d’agir, s’agissant de fraude fiscale, que sur plainte des autorités publiques en charge du recouvrement de l’impôt.  Cette disposition, qui contrevient manifestement à l’égalité des contribuables devant la loi (ceux qui acceptent une transaction avec le fisc sont dispensés de poursuites pénales) a déjà fait l’objet d’un aménagement : pour éviter les interventions personnelles et mettre un peu plus de transparence, le fisc saisit désormais, depuis 1977, une « Commission des infractions fiscales », composée de magistrats et de personnalités qualifiées, qui se prononce sur l’orientation de certains dossiers vers la justice. Le dispositif restait toutefois marqué par des décisions d’opportunité contestables. Quand on veut moraliser un dispositif, mieux vaut ne pas le faire à moitié. Pourtant, c’est à nouveau le choix de la prochaine loi sur la fraude fiscale en attente aujourd’hui de promulgation. Certes, la transmission sera désormais obligatoire pour les fraudes supérieures à 100 000 euros, ce qui est un net progrès. Ce sont toutefois les moins nombreuses. Pour les autres, on en reste à un entredeux peu satisfaisant, le fisc continue à avoir la priorité et le parquet n’a pas reçu droit d’auto-saisine. Il en avait pourtant été question un temps dans la discussion parlementaire, ce qui aurait permis d’avancer un peu plus vers la normalisation des procédures. Pour la plupart des dossiers, le fisc réglera l’affaire en agitant la menace de saisir la justice pour obtenir un compromis avantageux. Autre disposition de la loi, la possibilité pour les fraudeurs de signer une convention judiciaire d’intérêt public qui, jusqu’alors, n’était accessible qu’aux personnes morales mises en cause pour corruption ou blanchiment. La procédure, initiée par le Procureur avant lancement d’une action publique, avalisée par un juge, impose à la personne de payer une amende et de réparer les dommages causés sans qu’elle soit reconnue coupable ni que la convention soit assimilable à un jugement. En quelque sorte, on passe devant des représentants de la justice mais de son plein gré et, s’il y a réparation du préjudice et pénalisation, il n’y a pas culpabilité. Justice sans justice…mais justice rapide pour l’Etat et indolore pour les entreprises, sans altération de l’image. La loi reste douce aux entreprises malhonnêtes…