Assurance chômage : des mesures financières à courte vue

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Assurance chômage : des mesures financières à courte vue

En septembre 2018, l’Etat a demandé aux partenaires sociaux de négocier des amendements à l’actuelle convention d’assurance chômage, pour des motifs d’économies (il souhaite économiser en 2 ans 3,4 Mds) mais aussi de meilleure régulation du marché de l’emploi. Les principaux thèmes de négociation devaient porter sur le moyen d’éviter la multiplication des embauches en CDD ; sur les règles de cumul entre activité réduite et indemnités chômage, qui installent nombre de demandeurs d’emploi dans une « précarité durable » ; sur la différenciation des règles à appliquer selon la catégorie des demandeurs d’emploi et, en pratique, leur revenu.

La négociation, qui a duré de longs mois, s’est terminée par un échec, au demeurant prévisible : les représentants patronaux avaient pesé en 2017 pour l’abandon de la pénalisation financière des contrats courts et ne voulaient pas y revenir. Les syndicats de salariés savaient que, si le régime n’économisait pas sur les contrats courts (qui pèsent très lourdement sur son équilibre financier), les droits des assurés devaient être rabotés pour atteindre les objectifs d’économies voulus par le gouvernement et ils s’y refusaient. L’échec de la négociation a donc contraint l’Etat à prendre des décisions.

Le plan annoncé en ce mois de juin est vraiment sévère. L’on attendait l’institution d’un bonus-malus sur le recours aux contrats courts mais, au final, celui-ci ne touche pas tous les secteurs et épargne le BTP et le secteur médicosocial, très consommateur de contrats courts compte tenu d’un taux d’absentéisme élevé. La précédente modulation en vigueur jusqu’en 2017 avait échoué parce qu’elle ne s’appliquait pas assez largement et on risque, à nouveau, de reproduire ce schéma. La majoration sera au maximum de 0,95 point de cotisation, avec un forfait de 10 € pour les CDD dits d’usage, parfois très courts. L’on attendait également la dégressivité des allocations chômage pour les cadres : elle touche au final, après 6 mois, ceux dont le revenu mensuel brut est égal à 4500€, ce qui n’est pas si élevé, et qui verront leur indemnisation baisser alors de 30 %. La mesure est dure, surtout expliquée par les mots « le travail doit payer davantage que le non-travail », d’autant que rien ne prouve que la dégressivité accélère les recherches. La mesure la plus dure porte sur l’allongement à 6 mois de la période de travail préalable qui ouvre droit à indemnisation, qui va pénaliser les jeunes et les travailleurs intermittents, d’autant que les règles de « rechargement » de l’assurance chômage, qui permettait à un demandeur d’emploi qui n’avaient pas totalement épuisé ses droits de les recharger au terme d’une nouvelle période de travail même courte, obéissent à la même règle des 6 mois, ce qui en réduit considérablement l’intérêt. De même, le mode de calcul des allocations (sur le salaire mensuel moyen et non le gain journalier) conduit à les baisser. Au final, les économies sont moins faites sur les entreprises que sur les demandeurs d’emploi : c’était exactement ce que les organisations syndicales voulaient éviter mais c’est en ce sens que le gouvernement a tranché.