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Barème des indemnités prudhommales: la validation surprise de la Cour de cassation

L’ordonnance travail du 22 septembre 2017 a modifié l’article L1235-3 qui dispose désormais que, en cas de licenciement abusif (sans cause réelle et sérieuse), l’indemnité fixée par le juge doit s’inscrire dans un barème comportant un minimum et un maximum qui varient selon l’ancienneté du salarié et la taille de l’entreprise.  L’objectif des ordonnances était d’améliorer, pour les entreprises, surtout les PME, la « prévisibilité » du coût d’un licenciement et le gouvernement avait expliqué qu’il avait construit le barème sur le fondement des indemnités accordés en moyenne : le barème n’aurait eu pour objet que d’éviter les décisions aberrantes.

Plusieurs conseils de prud’hommes ont pourtant accordé à des salariés abusivement licenciés des indemnités supérieures au barème, en se fondant sur l’article 10 de la convention 158 de l’Organisation internationale du travail (selon lequel les tribunaux sont, dans ce cas, « habilités à ordonner le versement d’une indemnité adéquate ou tout autre forme de réparation considérée comme appropriée ») qui semblait laisse toute liberté aux juges pour adapter le montant de l’indemnité au cas d’espèce. Les Conseils de prud’hommes concernés se sont appuyé sur l’article 55 de la Constitution, selon lequel les accords ratifiés ont une autorité supérieure à celle des lois.

La Cour de cassation, saisie pour avis par un Conseil de prudhommes, s’est prononcée le 17 juillet 2019 : l’avis indique que l’article 10 de la convention 158 est tout à fait applicable au calcul des indemnités dues pour un licenciement infondé mais que le barème des ordonnances travail est compatible avec cet article :  la Cour considère que le terme « adéquat » s’interprète comme donnant une marge de décision aux Etats et que le fait que la réglementation soustraie les licenciements déclarés nuls (par exemple les licenciements discriminatoires) à ce barème renforce la conformité des ordonnances à l’article 10. A vrai dire, l’on peut ne pas être convaincu par l’argumentation de la Cour et considérer que le terme « adéquat » renforce le pouvoir d’appréciation du juge et non le pouvoir d’encadrement de l’Etat.  Certains juristes dépités par cet avis soulignent qu’il ne s’agit précisément que d’un avis et pas d’un jugement. Certes. Cependant, le Conseil d’Etat avait déjà jugé que rien dans la convention de l’OIT n’interdit à un Etat de fixer un barème et, par ailleurs, ’on imagine mal toutefois la Cour revenant dans un arrête sur un avis, même contestable, donné en Assemblée plénière. Dont acte donc.