L’Etat a annoncé son intention de déposer prochainement auprès de l’Autorité des marchés financiers une offre de rachat des 16 % du capital d’EDF dont il n’est pas propriétaire pour en devenir l’actionnaire à 100 %. Il ne s’agit pas d’une véritable « renationalisation » (EDF garde son statut de SA) mais d’une modification de l’actionnariat. L’opération va coûter cher (près de 10 Mds d’euros) et sans doute poser problème, d’abord auprès des autres actionnaires puisque l’offre d’achat repose sur un prix nettement inférieur au prix de l’entrée en bourse en 2005, ensuite, bien que le gouvernement s’en défende, auprès de la Commission européenne.
Le gouvernement justifie sa décision par la crise actuelle de l’énergie, la menace de coupure du gaz russe et « la nécessité de prendre des décisions maintenant », expliquant vouloir avoir les coudées franches pour décider rapidement. Pourtant l’Etat est déjà le quasi seul décideur à EDF. La décision peut sans doute aussi s’expliquer par la situation financière d’EDF, devenue encore plus critique qu’auparavant : jouent les obligations imposées par l’Etat pour baisser les prix de l’énergie, le fait que le « carénage » des vieilles centrales semble plus problématique que prévu et que les pannes ou les difficultés techniques s’amplifient. Mais, si l’Etat peut d’ores et déjà recapitaliser EDF, il ne peut, en vertu des règles européennes, lui verser des aides ni directement financer certains investissements. En fait, le lien entre la décision de « renationaliser », la lutte contre l’augmentation du prix de l’énergie et l’engagement d’un programme de construction de nouvelles centrales existe mais est sans doute un peu plus complexe. Certains experts craignent que la renationalisation ne recouvre la volonté de revenir au projet de démantèlement d’EDF, qui confiait à l’Etat le nucléaire, quitte à privatiser les autres activités (énergies renouvelables) plus rentables.
Si un message est clair en tout cas, c’est la volonté d’engager très vite l’étude et la construction de nouvelles centrales. Le pari est osé, juridiquement (la programmation pluriannuelle de l’énergie n’en dit mot et il va falloir concerter un minimum pour modifier ce document) et politiquement : comment dire que l’on fait face à la crise de l’énergie et au défi climatique en engageant tous ses moyens dans la construction de centrales qui ne seront opérationnelles, au mieux, que dans 10 à 15 ans ?